SEMINAIRE DE FORMATION DES TEMOINS SUR LA SURVEILLANCE DES ELECTIONS
1. INTRODUCTION
Pour la première fois en 46 ans, l’électoral congolais (25,5 millions d’électeurs enrôlés) sera appelé à voter dans quelques 50.000 bureaux de vote pour 33 candidats aux élections présidentielles, plus de 9.000 candidats aux législatives nationales et plus de 13.000 candidats aux assemblées provinciales. Ces élections historiques constituent le processus électoral le plus vaste et le plus complexe.
La présence des témoins des candidats a pour but d’assurer la transparence des opérations électorales. Les observateurs nationaux et internationaux ainsi que les témoins des candidats indépendants ou des partis politiques ou des regroupements politiques sont présents dans les bureaux de vote pour dénoncer les irrégularités.
La présente session de formation permettra aux témoins des candidats indépendants, partis politiques et regroupements politiques d’avoir à l’avance des informations sur le parfait déroulement ou non des élections et les résultats provisoires de ces candidats pour circonscription électorale avant la publication provisoire de la Commission Electorale Indépendante et la juridiction compétente, selon le cas.
A l’issue de cette formation, les participants seront capables de mieux surveiller les élections et de dénicher les cas de fraudes et d’irrégularités dans les bureaux de vote et de dépouillement.
2. ESSAI DE DEFINITION
Est témoin, selon l’article 37 de la loi n° 06/006 du 09 mars 2006 portant organisation des élections présidentielle, législatives, provinciales, urbaines, municipales et locales, tout Congolais mandaté par un candidat indépendant, un parti politique ou un regroupement politique et accrédité par la Commission Electorale Indépendante pour assister aux opérations électorales.
Pour de raisons de clarté, les termes « mandat et accréditation » contenus dans cette définition méritent une explication.
Le mandat est une procuration donnée par la personne ayant qualité à une autre personne pour agir en son nom et compte. Le mandaté n’agit pour lui-même, il agit pour autrui. L’accréditation en revanche, signifie ici, l’acceptation de la personne mandatée par la Commission Electorale Indépendante. L’article 39 de la loi électorale indique la procédure à suivre pour cette accréditation :
- choix du témoin parmi les personnes inscrites sur la liste des élections ;
- notification à la représentation locale de la Commission Electorale Indépendante au moins sept jour avant le début du scrutin des noms des témoins désignés, avec indication des bureaux auxquels ils sont affectés ;
- délivrance de la carte d’accréditation avec la mention « témoin » par la Commission Electorale Indépendante dans un délai de cinq jours.
3. ACCREDITATION DES TEMOINS
Le nombre de témoins par candidat indépendant, parti politique ou regroupement politique et par bureau de vote ou de dépouillement est fixé à un (Art. 40 alinéa 4 de la loi électorale). Selon l’article 58 de la décision n° 003/CEI/BUR/06 du 09 mars 2006 portant mesures d’application de la loi électorale, le Président du bureau de vote et dépouillement (BVD) peut limiter à six le nombre des témoins simultanément présents dans un BVD. S’il y a plus de six témoins, les règles suivantes s’appliquent :
1°) Les six premiers témoins des candidats, des partis ou regroupement politiques différents arrivés sur les lieux sont les premiers considérés ;
2°) Les autres témoins des candidats, partis ou regroupements politiques présents dans le BVD vont remplacer les premiers par période de quinze minutes par ordre d’arrivée. En cas d’arrivée simultanée l’ordre alphabétique des noms des témoins est considéré.
Pour nous, il serait logique de régler une telle situation en procédant au choix équilibré des témoins par regroupement politique.
4. FONCTIONNEMENT D’UN BUREAU DE VOTE
Le bureau de vote doit être suffisamment éclairé est pourvu de tout le matériel électoral requis. Les listes des candidats et leurs photos doivent y être affichés. Il est ouvert à 6 heures et, il est clôturé à 17heures, heures locale. Les membres du bureau de vote doivent arriver au bureau de vote à 5 heures du matin.
Le Président du bureau de vote dispose du pouvoir de police à l’intérieur de la salle de vote et à ses abords immédiats. Le jour même du vote, le Président du bureau comptera le nombre total des bulletins non encore utilisés. Il ouvrira l’urne pour montrer à chacun qu’elle est bien vide. Après cela, le Président du bureau refermera à nouveau l’urne.
Il est interdit aux militaires et aux éléments de la Police d’être à l’intérieur du bureau de vote. De même, il est interdit aux membres du bureau de vote, aux témoins et observateurs de dire à un(e) électeur (trice) le candidat à voter.
Pour voter dans un bureau de vote, il faut remplir les deux conditions suivantes : avoir sa carte d’électeur et être inscrit sur la liste de ce bureau de vote. Par dérogation, les personnes suivantes peuvent être admis à votre dans un bureau de vote où elles n’ont pas été inscrites. Il s’agit de : les membres de la Commission Electorale Indépendante, les membres du bureau de vote, les candidats à élire, les témoins, les observateurs, les journalistes et les agents de carrière des services publics en mission ou en mutation.
5. DROITS ET OBLIGATIONS DU TEMOIN
5.1. DROITS DU TEMOIN
Comme droits, le témoin peut voter en dehors de son lieu d’enrôlement. Etre présent dans les bureaux de vote durant le déroulement du scrutin et pouvoir se relayer, si possible. Exiger une copie du procès-verbal dûment rempli et signé par tous les intervenants.
5.2. OBLIGATIONS DU TEMOIN
- Arriver au moins une heure avant l’ouverture du bureau de vote;
- Présenter sa carte d’accréditation au Président du bureau de vote ;
- Porter sa carte d’accréditation de manière visible ;
- Exiger la mention de toute observation, réclamation et contestation touchant à la régularité des opérations électorales dans le procès-verbal avant que celui-ci ne soit placé sous plis scellé ;
- Contresigner le procès-verbal des opérations électorales ;
- Accompagner les urnes jusqu’au bureau de liaison et au bureau provincial de la Commission Electorale Indépendante et assister à la centralisation des résultats électoraux ;
- Rendre rapidement compte par écrit à son candidat indépendant, parti politique ou regroupement politique.
En ce qui concerne la contre-signature du procès-verbal des opérations électorales par les témoins, nous demandons aux témoins de signer avec réserves si le Président du bureau de vote refuse de mentionner dans le procès-verbal, toute observation, réclamation et contestation.
6. FRAUDES ELECTORALES
Sur ce point précis, nous nous inspirons de la documentation « Electoral averti, attention aux quatorze tricheries électorales fondamentales » publiée par la LINELT (ligue Nationale pour les Elections Libres et Transparentes) en 1996. Selon la LINELIT, il y a quatorze tricheries électorales suivantes :
- Tricherie par une mauvaise loi électorale ;
- Tricherie par une mauvaise commission électorale ;
- Tricherie par une mauvaise organisation du scrutin ;
- Manipulation des bulletins de vote ;
- Exploitation de l’ignorance des électeurs (analphabètes, aveugles, etc ..),
- Tricherie par l’encre indélébile visible ;
- Manipulation des urnes pendant leur déplacement ;
- Tricherie pendant le dépouillement ;
- Tripotage des chiffres à la publication des résultats ;
- Complicité de la justice électorale lors des contentieux ;
- Le gerrymandering (découpage électorale injuste, création de trop peu de circonscriptions électorales dans un secteur favorable à tel candidat que l’on veut combattre) ;
- Tricherie par ordinateur ;
- Tricherie par épuration ethnique.
7. EXPULSION DU TEMOIN
Selon les alinéas 1 et 2 de l’article 40 de la loi électorale, l’expulsion d’un témoin du bureau de vote est autorisé en cas de désordre provoqué par lui ou d’obstruction aux opérations électorales. Le témoin expulsé est remplacé par son suppléant.
Quel que soient les irrégularités constatées dans le déroulement des opérations électorales, tout témoin ne doit pas utiliser la violence pour se faire entendre. Il doit faire preuve de beaucoup de diplomatie et de sagesse pour demander au Président du bureau de vote avec les concours des observateurs accrédités à ce bureau, de mentionner lesdites irrégularités dans le procès-verbal.
8. DEPOUILLEMENT DES BULLETINS DE VOTE ET PROCLAMATION DES
RESULTATS
8.1. DEPOUILLEMENT DES BULLETINS DE VOTE
La question de dépouillement est traitée par les articles 62 à 67 de la loi électorale et par les articles 47 et 50 de la mesure d’application de cette loi.
A la fin des opérations de vote, le bureau de vote devient le bureau de dépouillement devant les témoins, les observateurs, les journalistes présents et cinq électeurs désignés par le président du bureau de dépouillement. Le dépouillement s’effectue sans interruption et les procès verbal de dépouillement contient normalement les mentions suivantes :
- l’heure d’ouverture et de clôture ;
- les réclamations et contestations ;
- les décisions du bureau
- les noms des candidats et les suffrages respectivement obtenues ;
- le nombre de bulletins sortir de l’urne ;
- le nombre de bulletins nuls ;
- le nombre de suffrages valablement exprimés ;
- les noms des membres du bureau de vote et de dépouillement ;
- Les noms de cinq électeurs désignés.
8.2. PROCLAMATION DES RESULTATS
La question de la proclamation des résultats est traitée par les articles 68 à 72 de la loi électorale et les articles 51 à 54 de la mesure d’application de cette loi. Cette proclamation se fait à quatre niveaux : bureau de dépouillement, centre de compilation, commission électorale indépendante.
Au niveau du bureau de dépouillement et du centre de compilation, les résultats sont immédiatement rendu publics et affichés devant le bureau après la signature des procès-verbaux par les membres du bureaux ou centres et par les témoins. La compilation s’effectue à deux niveaux :
- Au niveau local (bureau de liaison), par le centre local de compilation des résultats (CLCR)
- Au niveau national par le Centre National de Centralisation des Résultats. (CNRC)
La Commission Electorale Indépendante publie les résultats provisoire de vote après délibération sur les réclamations et contestations éventuelles en ce qui concerne les erreurs matérielles.
Selon l’article 72 de la loi électorale, la Cour Suprême de Justice, la Cour d’Appel, le Tribunal de Grande Instance ou le Tribunal de Paix du ressort selon le cas, proclame les résultats définitifs des élections présidentielles, législatives, provinciales, urbaines, municipales et locales dans les quarante-huit heures qui suivent la transmission des résultats provisoires si aucun recours n’a été introduit devant ces juridictions.
9. CONCLUSION
La surveillance des élections par les témoins constitue un moment le plus important pour tout candidat indépendant, parti politique et regroupement politique. A ce sujet, la distraction n’a pas la voix au chapitre.
Le choix des témoins ne doit pas se faire de manière hasardeuse. Il doit être guidé par les critères de compétence, l’esprit de clairvoyance et la culture de service dans le chef des personnes à désigner à cette fin.
Au moment du dépouillement des bulletins de vote, le témoin doit faire preuve d’une vigilance tous azimuts lors du comptage des voix et leurs inscriptions sur les fiches des résultats. Il doit avoir une calculatrice avec lui pou ne pas faire le calcul mentalement.
La mission d’un témoin prend fin avec le dépôt de son rapport accompagné de la copie de la fiche des résultats. Ce rapport doit être déposé à temps en vue de permettre au candidat indépendant, parti politique et regroupement politique d’avoir des informations sur le déroulement des opérations de vote et le résultat de vote.
Fait à Kinshasa, le 24 Juin 2006.
Marcel TSHIBOLA
Secrétaire Exécutif National
CONAJECO asbl
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