La RDC veut sauver ses forêts et présenter la facture aux bailleurs
(AFP)La République démocratique du Congo (RDC) se dit déterminée à "sauver" sa forêt, deuxième poumon de la planète après l'Amazonie, mais prévient que la conservation faite au détriment des impératifs économiques du pays devra être compensée par les bailleurs internationaux.
Rejouer A la veille d'une visite du ministre français de l'Ecologie Jean-Louis Borloo axée sur la préservation de la biodiversité, son homologue congolais, José Endundo, a présenté sa position.
"Nous sommes tous d'accord pour dire que ce réservoir unique de biodiversité (10% de la forêt mondiale) est un enjeu majeur de la lutte contre la production de gaz à effet de serre, mais vous ne pouvez pas continuer à polluer sans contrepartie".
"Cela veut dire que la communauté internationale, les pays riches, doivent faire en sorte de contribuer", dit-il, avant de donner son prix: "Aujourd'hui, la forêt congolaise vaut au moins 3 milliards de dollars par an".
Il voudrait voir cette aide se traduire en appui budgétaire et en un soutien plus massif aux réformes institutionnelles et aux besoins de formation.
De son côté, il s'engage à étendre les surfaces des aires protégées et à mener à bien la lente réforme du secteur forestier, entamée en 2002 avec la publication d'un code forestier et d'un moratoire sur l'attribution de titres d'exploitation.
Une commission interministérielle, à laquelle participent des représentants d'ONG, des communautés locales et un expert indépendant, entamera fin juin l'examen des 156 titres existants, couvrant plus de 20 millions d'hectares, soit le tiers de la surface exploitable de RDC.
Ces titres seront soit validés et convertis en concession forestière, soit annulés s'ils sont jugés illégaux.
L'organisation écologique Greenpeace demande que "tous les titres octroyés, échangés ou renouvelés en violation du moratoire de 2002 soient annulés" et plaide pour une prolongation du moratoire jusqu'à ce qu'un "plan de zonage complet et participatif ait été établi".
Mais pour un expert du secteur ayant requis l'anonymat, "le plan de zonage va prendre au moins 10 ans. En attendant, même si la RDC reversait 10 millions d'hectares dans le domaine public, cela ne règlerait pas la question de leur préservation, que l'Etat est incapable d'assurer faute de moyens, du fait de la corruption de ses fonctionnaires et de la pression démographique".
De son côté, José Endundo refuse d'anticiper sur les résultats de la commission mais se dit déterminé à assainir le secteur.
"Nous exportons environ 200.000 m3 de bois, essentiellement brut, par an, qui rapportent 49 millions de dollars. L'Etat ne perçoit en tout et pour tout que 1,8 million de dollars de taxes et impôts, ce qui est totalement ridicule", explique-t-il.
"Nous devons arriver à produire et exporter du bois transformé, ce qui créera plus de richesses et de l'emploi, dit-il. Mais nous devons d'abord faire appliquer la loi", en imposant des normes (plan d'aménagement, respect des cahiers des charges) aux industriels, qui dénoncent "avec raison parfois" des défaillances de l'Etat.
Or, pour Greenpeace, "la légalité n'est pas définie", car il y a eu très peu de décrets d'application du code forestier, pas de normes nationales d'aménagement, aucun respect ni contrôle des plans de coupe annuels. Et si la forêt est en partie protégée par son enclavement, la production de bois pourrait rapidement décupler si le pays développait ses infrastructures.
Pour un autre expert, la sanctuarisation de la forêt congolaise est tout aussi improbable qu'un "chèque en blanc" des bailleurs à la RDC sans garanties de gouvernance. A défaut, il faudrait mettre en place des normes et un système d'appel d'offre transparent, tout en cherchant des solutions alternatives à travers la gestion de forêts communautaires ou la création de puits de carbone.
Article de AFP Lu pour vous par Jeunesse du Monde Kinshasa

