Rcd : 8 députés suspendent leur participation aux travaux de l’Assemblée nationale
Dans une lettre datée du 9 juillet et adressée à Me Azarias Ruberwa, Vice-président de la République et Président du RCD, M. Bizima Karaha ainsi que sept autres députés/Rcd du Nord-Kivu suspendent leur participation aux travaux de l’Assemblée Nationale et réclament en même temps la tenue à Goma, dans le plus bref délai, d’une session des instances du parti consacrée à l’évaluation de la transition. En tout cas, insistent-ils, « tout le monde voit bien que l’atmosphère est devenue irrespirable à Kinshasa et qu’un énorme déficit de confiance caractérise les relations entre les partenaires politiques au gouvernement de transition ». Concernant les objectifs poursuivis par la transition telle qu’elle a été conçue au Dialogue inter-congolais à Sun City, les signataires affirment : « Il faut avoir le courage de reconnaître que nous nous sommes trompés dans l’établissement des priorités.
Quant aux événements qui ont endeuillé Bukavu, ils ont été rendus possibles, prétendent-ils, par le climat de haine interethnique entretenu dans cette ville depuis plusieurs mois ; ils sont le fruit du discours incendiaire et outrancier régulièrement tenu par certaines personnes installées au cœur du pouvoir à Kinshasa, en particulier dans l’entourage présidentiel, au gouvernement, au PPRD et au M17. Ce discours, poursuit cette lettre, est relayé dans le pays à la fois par des média de la haine se réclamant de la mouvance présidentielle et par la surenchère xénophobe dans laquelle s’illustrent constamment et impunément la Société Civile et la hiérarchie catholique du Sud Kivu.
Mais en dépit de ce remue- ménage, il y a tout de même des îlots de paix qu’il ne faut pas troubler. Ils citent en exemple le climat de sérénité qui prévaut au Nord-Kivu. Ainsi, au Nord-Kivu les communautés ethniques réapprennent à vivre ensemble dans la paix ; et la circulation des biens et des personnes est une réalité. Toutes les ethnies se valent à en croire le document.
Les signataires rappellent entre autres les circonstances dans lesquelles le major Kasongo a été arrêté puis relâché ainsi que la suspension du Colonel Mutebusi; les incidents du Palais du Peuple lors de la célébration de la journée internationale de la femme, l’enquête traîne sur la tentative du coup d’Etat de fin mars 2004 ; la demande de mise sous protection de la Monuc/Goma des membres de la délégation gouvernementale conduite par Azarias Ruberwa à la veille de la prise de Bukavu…
Alors que le processus d’intégration de l’armée est en cours, les députés Rcd notent : « Il faut que ceci soit clair : aucun soldat issu d’une communauté ethnique non rassurée n’acceptera jamais le brassage dans une armée qui admet en son sein les génocidaires ex-FAR et Interahamwe. Ce serait plus suicidaire, car cela reviendrait à s’exposer à des assassinats sélectifs sans bruits ni trompettes, comme on vient de le vérifier à nos dépens au Sud Kivu ». Cette lettre met à rude épreuve la transition et elle annonce déjà un blocage du processus démocratique en cours. Car pour s’exprimer, les députés ont préféré élire domicile à Goma et envoyer sous forme d’un ultimatum à peine voilé leurs revendications au président du Rcd.
La Monuc se dit décidée à défendre la RDC contre toute attaque militaire
« Nous combattrons tout élément qui tenterait d’attaquer à nouveau ou d’entrer militairement à Bukavu ». C’est ce qu’a déclaré le Porte-parole militaire de la Monuc, le commandant Abou Thiam, mercredi dernier au cours du point de presse hebdomadaire de la mission onusienne.La Mission des Nations Unies au Congo promet d’utiliser tous les moyens qui sont à sa disposition pour défendre l’Est de la RDC, a-t-il poursuivi.
Comme on peut le deviner,en déclarant cela, le Commandant Abou Thiam faisait allusion aux deux officiers dissidents de l’Armée nationale, à savoir : Laurent Nkundabatware et le Colonel Jules Mutebusi qui n’ont cessé depuis un certain temps de menacer de rentrer à l’Est du Congo non sans violence.
Par ailleurs, le Porte- parole de la Monuc a annoncé que la brigade du Kivu a envoyé une patrouille de liaison à Minova, frontière entre le Nord et le Sud-Kivu, en vue de rencontrer Laurent Nkunda.
Cette rencontre avec les dissidents de l’Armée congolais avait pour but de vérifier les allégations de recrutement des enfants, de récupération des taxes pour la contribution à l’effort de guerre et les velléités bellicistes à l’égard de Bukavu. Allégations rejetées par Laurent Nkunda d’après le commandant Abou Thiam qui précise même que Laurent Nkunda a réaffirmé sa loyauté vis-à-vis du gouvernement de transition. Toutefois, malgré cette déclaration, la Monuc a tenu quand même à mettre Laurent Nkunda en garde contre toute tentative d’une attaque à l’Est de la RDC.
D’autre part, le commandant About Thiam a déploré à la même occasion, la poursuite des combats qui opposent à Mahagi les factions du Front des Nationalistes et intégrationnistes et les Forces armées du peuple congolais. A ce jour, ces affrontements sanglants auraient fait 48 victimes dont 4 civils, 14 des FAPC et 27 du côté des FNI, à indiqué le commandant Thiam.
Le mandat de la Monuc arrive bientôt à terme
M. AMADOUM Touré, porte- parole de la Monuc, a annoncé la fin à partir du 31 juillet prochain de l’actuel mandat de la Mission des Nations Unies au Congo. C’est pour cette raison que le Représentant spécial du Secrétaire général des Nations Unies, M. William Lacy Swing quitte Kinshasa ce jeudi 15juillet 2004 pour New-York, dans le cadre des consultations sur le mandat de la mission qu’il dirige.
Par ailleurs, le Secrétaire général des Nations Unies, Koffi Annan, va soumettre au Conseil de sécurité un nouveau rapport sur les activités de la Monuc. Ce rapport sera soumis avec des propositions sur les besoins prioritaires de la mission onusienne, a précisé le Porte-parole Touré. Il sera également question de déterminer de quelles ressources la Monuc aura besoin pour s’acquitter convenablement de son mandat.
Les Evêques de la RDC encouragent le peuple congolais à se prendre en charge
« Nous sommes heureux de constater que le peuple s’efforce de rompre avec une culture de la résignation pour se prendre en charge avec détermination. En affichant sa désapprobation vis-à-vis de la reprise de la guerre à l’Est, notre peuple a brisé le tabou de la peur. Une telle attitude démontre qu’il croit en sa capacité d’influer sur le processus politique et l’histoire de notre pays »
Voilà un extrait du message de l’épiscopat congolais à l’issue de la 38ème Assemblée plénière de la Conférence épiscopale nationale du Congo qui s’est tenue à Kinshasa du 28 juin au 3 juillet 2004.
Toutefois, les princes de l’Eglise demandent au peuple congolais « d’agir de façon réfléchie et ordonnée, pacifiquement mais efficacement, sans compromettre ses propres intérêts ni donner des prétextes à ses ennemis»
Points de vue
Claude EFONGO
Président de l’Association socio-culturelle pour l’enfance et la jeunesse
Qui se moque de qui ?
« Le retrait des huit députés du ex- mouvement rebelle Rcd me paraît très contradictoire et flou dans ce sens que la raison avancée par ces députés est que jusqu’à ce jour, l’armée n’est pas encore réunifiée et réintégrée à une année de la fin de la transition. Les observateurs de la politique congolaise savent que les différents foyers de tension sont entretenus par les ex- officiers supérieurs du Rcd. L’exemple le plus frappant c’est l’aventure militaire de L.Nkunda et de J. Mutebusi.
Si nous observons bien, même le silence complice des ex-députés lors de la prise de Bukavu par le fait qu’il n’y a eu aucune déclaration politique de ces députés, prouve qu’il y a une main invisible dans cette aventure de ces ex-officiers supérieurs de Goma. Nous nous posons la question de savoir, qui se moque de qui dans ce pays ? Comment un député national qui est censé maîtriser les dossiers brûlants de son pays, peut suspendre sa participation aux travaux de l’Assemblée nationale en invoquant des arguments qui ne sont pas valables ? Avec ces tensions tantôt en Ituri tantôt à Goma, à Bukavu et j’en passe, peut-on parler de la réunification de l’armée congolaise ? En guise de conclusion, c’est du théâtre populaire au sein du Parlement joué par les huit députés du Rcd. A mon humble avis, ils devraient d’abord commencer par adresser un mémorandum au président de l’Assemblée national avec copie pour information au vice-président en Charge de questions politiques et militaires qui est curieusement le président du Rcd et également au président de la République. Et dans le contenu de leur mémorandum, ils devraient poser la question de savoir pourquoi jusqu’à ce jour il n’y a pas encore intégration de l’armée ? ».
Pierre Kalenda
Physicien
Nous voulons une transition pacifique et sérieuse
« Je pense que c’est un acte irresponsable. Les huit députés qui ont décidé de suspendre leur participation au parlement ont tout simplement oublié qu’ils sont parlementaires de la République Démocratique du Congo et non pas parlementaires de leur composante eu égard à l’Accord global et inclusif. D’autre part, il faut dire que nous tendons vers un Etat de droit et tous les problèmes doivent trouver leur solution dans le cadre des institutions démocratiques acceptées par tous. Personnellement, je dirai qu’ils marginalisent le parti auquel ils appartiennent à un an des élections. Je leur demanderai de reprendre place au parlement pour faire avancer la transition que nous voulons pacifique et sérieuse ».
Paul Diakese
Journaliste
Une Transition précaire
« Personnellement, ça ne m’étonne pas étant donné que ce n’est pas le dernier rebondissement de la transition. Et cela prouve la précarité de la transition, le manque de confiance de ceux qui nous gouvernent et aussi l’absence des leaderships entendu par là des personnes capables de pouvoir assurer les responsabilités politiques. Car comment expliquer que le Rcd qui est un grand parti politique puisse avoir chaque fois des dissidences ? Il ne faudra pas que cette dissidence puisse faire jaser les autres partis politiques existants dans le pays ».
