Des difficultes majeures se dressent sur la route des élections 2006

«L’enjeu est crucial. Il faut que le Congo aille aux élections avec un corps électoral suffisamment représentatif. Sinon , l’issue des élections risque donc d’être contestée. Le cauchemar logistique, mais également l’insécurité qui règne dans les différentes provinces, suscitent des interrogations quand il faut exécuter le calendrier désormais exigé par les donateurs. La fin de l’enregistrement (des électeurs) est prévue fin septembre, le premier scrutin, celui du référendum sur la Constitution le 25 novembre prochain.
Or, au vu des listes, les retards accumulés vont sans doute imposer un délai supplémentaire. Les acteurs de la transition devront donc prendre leurs responsabilités, dialoguer et trouver un consensus pour assumer le report et gérer ses conséquences. Sur le plan politique, ce retard produit déjà des effets. La
Cette réflexion est du Rfi captée la semaine dernière à Kinshasa commence à faire des émules sur place en Rdc, surtout au sein de la classe politique en quête d’un nouveau souffle. Le doute s’installe alors dans leur esprit et l’hypothèse des élections en 2006 s’apparente à une chimère.
Il est vrai que le premier à se prononcer sans hésitation sur cette question est le président national de l’Union pour la démocratie et le progrès social (Udps), Etienne Tshisekedi. Son parti est même monté au créneau, accusant nommément le Parti du peuple pour la reconstruction et le développement (Pprd), la Commission électorale indépendante et le Comité international d’accompagnement de la transition (Ciat). Face à des actes assimilés à ce qu’il a qualifié de « tricherie », essentiellement dans les nombreux dysfonctionnements qui continuent à entourer les opérations d’enrôlement et d’identification, le parti d’Etienne Tshisekedi s’est dit ne plus croire en la tenue en bonne et due forme des élections en 2006.
La Communauté internationale, à travers le Ciat, même si elle ne s’est pas clairement prononcée sur cette question, souffle désormais le chaud et le froid, émettant, en des termes à peine voilée, des doutes quant à la capacité des Congolais à organiser des élections réellement « libres et transparentes » en juin 2006. La tournée provinciale qu’effectue actuellement le Ciat, sous la conduite du représentant spécial du secrétaire général des Nations Unies en Rdc et chef de la Mission des Nations Unies au Congo (Monuc), William L. Swing, s’inscrit dans ce contexte de profond scepticisme de la communauté internationale, plus que disposée à accompagner la transition congolaise.
Le déplacement des membres du Ciat à l’intérieur du pays est une façon pour les partenaires extérieurs de jauger l’état d’avancement du processus électoral. C’est ainsi qu’à Mbuji-Mayi, chef-lieu de la province du Kasaï Oriental, des questions pertinentes ont été posées autant à la délégation du Ciat qu’aux membres du gouvernement qui les accompagnaient. Aussi, la délégation du Ciat a pris bonne note de toutes les difficultés qui entourent ce processus, promettant de les soumettre à la Commission électorale indépendante. Preuve irréfutable qu’il se pose réellement des problèmes sérieux susceptibles de porter un coup dur à l’engrenage du processus qui mène aux élections.
Entre-temps, comme dans une scène mélodramatique, des acteurs politiques se relayent dans les médias pour évoquer la non réalisation de certains préalables alors que d’autres explorent les profondeurs du pays pour battre campagne pour un processus devenu plus que jamais hypothétique. Car, outre le retard évident constaté dans l’enrôlement, fait qui remet déjà en cause les prédictions de la Cei d’atteindre le chiffre de 27 millions d’électeurs au terme des opérations, le brassage de nombreuses unités disparates de ce qui doit constituer des Forces armées de la Rdc en vue de doter le pays d’une véritable armée nationale est une véritable épine sur processus électoral de plus en plus fragile. Ces faits alimentent le doute, et suscitent craintes et inquiétudes.
D’où, la question fondamentale de savoir ce qui se passerait dans l’hypothèse où au 30 juin 2006, la Cei se déclarait incapable d’inviter le peuple congolais aux urnes ? Ces questions valent leur pesant d’or dans la mesure où le premier test auquel s’est soumis la Cei a révélé son inaptitude à conduire ce processus jusqu’à bon port. Les mêmes difficultés continuent à être signalées dans le Katanga, tout comme à l’Equateur où des kits électoraux atterrissent à compte gouttes au chef-lieu de la province. Au Bas-Congo, la Cei a clôturé les premières opérations d’identification dans un désordre indescriptible, mettant à l’écart du processus une bonne partie de la population.

DEUX HYPOTHESES…
Evidemment, pour répondre à l’interrogation sur le décor institutionnel d’après la date du 30 juin 2006, deux cas de figure peuvent être évoqués. La première suppose la tenue des élections sur toute l’étendue du pays. Comme ne cessent de le clamer les partenaires extérieurs, si cette option triomphait - la Communauté internationale s’y est fermement attachée – la Rdc s’ouvrira alors la voie à une troisième République dotée des institutions réellement démocratiques.
Toujours dans cette hypothèse, pour avoir consenti de nombreux sacrifices, les partenaires extérieurs «pousseront» jusqu’au bout les Congolais aux élections. Bonnes ou mauvaises, mais pourvu qu’elles aient lieu dans le seul but de sortir du tunnel, quitte à rectifier le tir si jamais les contestations auraient lieu. L’essentiel consiste à mettre un terme à la crise de légitimité. Dans ce contexte bien déterminé, la Rdc se prête bien à une transposition grandeur nature du schéma de l’Afghanistan ou de l’Irak.
La seconde hypothèse suppose que les élections, pour divers raisons, n’aient pas eu lieu. Il peut s’agir du déficit de sécurisation des élections, de la non intégration de l’armée, du retard occasionné par l’opération de l’enrôlement, du manque de dialogue qui conduirait à l’impasse politique, soit pour non adoption en temps voulu des lois essentielles. Il serait donc impossible, en pareille circonstance, d’organiser des élections.

TROIS SCENARIOS
Si par aventure politique, cette dernière hypothèse l’emportait, trois scenarii s’imposeraient au peuple congolais :
1.- La nomination d’un Coordonnateur du gouvernement. Ce scénario va se concrétiser par la nomination d’un Premier ministre. Et, sur ce point, des simulations prennent de l’ampleur dans différents cercles politiques, tant la présence dans la capitale de certaines grosses pointures ravivent des tensions dans ce sens. Dans ce cas, un dialogue va certainement s’imposer au sein de la classe en vue de s’aménager les voies d’actionner l’article 201 de la Constitution de la transition pour un éventuel amendement constitutionnel.
2- La co-administration : La Communauté internationale pourrait aussi s’impliquer, en tant grand donateur de la transition, pour, sans doute, pallier à la forfaiture qui colle à la classe politique congolaise. L’on évoque, à ce propos, le schéma à la Kosovo, avec comme seul objectif d’organiser les élections dans un délai relativement court. Car, pour les partenaires extérieurs, il ne sera plus possible de réunir encore des moyens financiers de l’ordre de 400 millions de dollars si on ratait la chance actuelle. Ces mêmes partenaires extérieurs qui sont engagés dans le processus de paix au Burundi, verraient d’un mauvais oeil un échec en Rdc. Surtout que les gouvernements auront un jour l’obligation de rendre compte à leur électorat.
3- Les impondérables. Comprenne qui pourra. Nous ne le faisons dire à personne. L’histoire universelle est fertile en rebondissements. Celle de l’Afrique ne manque pas de références, a fortiori, celle de la Rdc pourrait réserver bien d’impondérables. Pour autant que les raisons qui ont conduit à des guerres d’agression ne soient pas totalement éludées, la Rdc ne se trouve nullement à l’abri d’un probable boomerang politique, soit de par la volonté du peuple congolais, soit par un vent de l’extérieur. Comme pour dire que la Rdc n’est pas encore sortie de l’auberge.

Le processus d’identification et d’enrôlement en perte de vitesse
C’est le constat du Comité international d’accompagnement de la transition après le passage de sa délégation le week-end dernier, dans la ville de Lubumbashi, rapporte Radiookapi.net. Le Katanga n’est pas le seul bourbier où patauge la Cei, il y a également la province Orientale, l’Equateur. Les observateurs se demandent si la Cei pourra maintenir l’échéance du 28 août 2005, date prévue pour la fin des opérations dans la province du Katanga. Les premières difficultés relevées sont d’ordre logistique. Les kits sont disponibles, certes, mais la Cei éprouve des difficultés pour leur déploiement dans leurs centres respectifs. Pour résoudre la question, la Monuc envisage d’aumenter sa capacité aérienne afin d’accélérer l’acheminement du matériel.
De son côté, le gouvernement envisage de renforcer les unités logistiques de la Cei en mettant à sa disposition un hélicoptère et une vingtaine de véhicules. A l’intérieur de la province, à cette difficulté, s’ajoute le défi que constitue la présence des Maï-Maï. Ceux-ci, par le climat d’insécurité qu’ils imposent dans certaines contrées du Katanga, sont un véritable frein au démarrage des opérations d’enrôlement. C’est le cas des territoires de Pweto, Manono et Mitwaba, toujours dans le Katanga.
Le facteur humain n’est pas non plus à négliger. Certains opérateurs de saisie sélectionnés en sont à leur première expérience de l’utilisation d’un ordinateur. D’où le ralentissement de l’enrôlement. Au seizième jour du processus, le bilan est pour le moins maigre : 415.193 électeurs seulement sont inscrits pour un potentiel électoral attendu de 3 millions de personnes pour l’ensemble du Katanga.
Le Potentiel (Kinshasa)


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