ISSANDA
‘‘ALERTE ROUGE : UN DEFENSEUR DES DROITS DE L'HOMME DANS LES BUNKERS A SHABUNDA''
Depuis maintenant une semaine, Monsieur Bruno MUKULUMANIA de l’antenne Shabunda du Collectif d’Actions pour la Défense des Droits de l’Homme (CADDHOM) est recherché par les militaires de la 18ème Brigade ‘‘intégrée’’ pour qu’il paie le peau cassé. En effet, le samedi 13 septembre 2008 tout Shabunda est tombé dans la panique générale de suite d’un coup de balle, de type roquette, qui a retenti vers 15 heures locales.
Cette information a été diffusée sur les médias à Bukavu et à Kinshasa le même jour. C’est alors que le Commandant Brigade convoquera Monsieur Bruno pour lui demander si c’était lui qui avait livré cette information en dehors de Shabunda. L’intéressé, à l’issue d’un long interrogatoire, a nié ce fait.
Comme si cela ne suffisait pas, une cohorte de plus de 30 militaires a surgi à 20 heures locales dans la parcelle de Bruno où ils ont tiré quatre balles qui ont laissé les traces sur sa maison. Ils se sont par la suite introduits dans sa maison jusque dans la chambre pour le chercher, heureusement, le témoin gênant avait son ange gardien qui l’avait sauvé de justesse jusqu’à le conduire dans les bunkers où il vit désormais.
La chose que l’on doit savoir c’est que depuis un temps une campagne d’intimidation des défenseurs des droits de l’Homme a élu domicile dans le territoire enclavé de Shabunda. Et cette campagne avait commencé avec les arrestations et interpellations de Rigobert Buka, Pius MUKEMENGE et autres activistes de la société civile de la place en avril 2008.
Quelle que soit la façon dont cette information a été diffusée, il est indéniable que les populations du territoire de Shabunda sont restées traumatisées depuis tout le temps que la guerre imposée à la RDC a durée. L’on ne doit pas perdre de vue que Shabunda a hébergé plusieurs groupes et forces armés antagonistes qui se tiraient dessus jour et nuit. Et actuellement où l’attention est tournée vers les 5 chantiers de la République qui doivent se concrétiser, les populations n’ont plus besoin d’entendre même l’unique seul coup de canon que la 18ème Bridage veut passer pour une inadvertance du militaire. Les 4 balles tirées dans la parcelle de Bruno rentent-elles aussi dans le panier d’inattention ?
C’est le droit de la population d’informer sur le comportement asocial d’une Brigade, républicaine ou intégrée soit elle. La question qu’il convient de se poser est celle de savoir quelle est la mesure prise par l’autorité militaire de la place pour conduire le militaire qui aurait tiré par imprudence devant les autorités judiciaires ? La seule arrestation suffit-elle ? Et le détenu, s’il est déjà, n’a-t-il pas des droits à faire prévaloir après 48 heures de détention ?
L’actualité au niveau de la province fait état de la barbarie de Laurent Nkundabatware qui laisse perplexe toute personne avertie. Au lieu de rassurer les populations qui, avec les traumas de la guerre, s’imaginent déjà que cet homme mystifié de la RDC, Laurent Nkundabatware, avait aussi surgi à Shabunda, l’on se met à traquer les défenseurs des droits de l’Homme.
Eu égard à ce qui précède, ACADHOSHA formule les quelques recommandations suivantes :
1. A l’autorité militaire de la place
de cesser avec les intimidations dirigées vers les défenseurs des droits de l’Homme à Shabunda qui devaient pourtant être en parfaite collaboration avec elle ;
de déférer en justice le militaire qui aurait tiré par inattention pour qu’il ait l’occasion de se défendre et de donner la lumière sur son comportement ;
de veiller à ce que pareille situation ne se reproduise plus.
2. A l’autorité locale de la police nationale congolaise de la place
d’assurer la protection de Monsieur Bruno MUKULUMANIA ;
de veiller à la sécurité des personnes et de leurs biens.
3. A Administrateur du territoire de Shabunda
de s’impliquer dans le dénouement de cette crise qui veut s’installer entre les autorités militaires et les acteurs de la société civile en général qui devaient pourtant travailler la main dans la main.
4. Aux organisations de défense des droits de l’Homme et plus spécialement au REDHAC, au Réseau de protection, au RADHOSKI, à la FIDH, à Amnesty International, au Front Line et à la PBI
de suivre ce cas et de s’assurer que la protection de Monsieur Bruno MUKULUMANIA en particulier et d’autres acteurs de la société civile en général reste assurée à Shabunda ;
de renforcer les capacités des défenseurs locaux sur les techniques de plaidoyer en matière de violation des droits de l’Homme ;
d’appuyer la tenue à Shabunda d’un dialogue entre les acteurs de la société civile d’une part et les autorités administratives, policières, militaires et coutumières de l’autre sur la collaboration en adoptant un cadre permanent de concertation.
‘‘MAXIMISER LES RECETTES A SHABUNDA: UN DEFIT DIFFICILE A RELEVER’’
Après plusieurs périodes de conflits armé, le territoire de Shabunda comme tous les autres territoire de la RDC, a besoin d’être développé et surtout que le passage de la guerre y a fortement affecté tous les secteurs de la vie. Et le défi majeur pour la reconstruction de Shabunda reste aussi la maximisation des recettes par les services de l’Etat et leur bonne utilisation ou affectation.
Le problème sur le terrain fait que les recettes perçues par les services territoriaux ne reflètent pas la réalité tant il est vrai que plusieurs situations verrouillent le système de perception dans ce territoire. Parmi eux, ACADHOSHA asbl s’est limité à la documentation de deux cas dont l’implication des militaires comme la première cause et les manœuvres des agents de l’Etat étant la seconde.
S’agissant des militaires, il convient de relever que, pendant la période couverte par ce rapport, ce sont les militaires de la 18ème Brigade intégrée qui percevaient les taxes sur les matières premières à l’aérodrome de Lulingu.
Au niveau des aérodromes et pistes d’atterrissage placés sous l’autorité de la RVA, ACADHOSHA asbl a fait le constat malheureux que les militaires sèment le désordre incontrôlé lors de l’atterrissage et de décollage des avions où ils exigent des agences certains frais sur le transport de passagers et matières premières. Et avant l’interdiction de transport des personnes dans les Antonov, les militaires avaient droit à deux personnes appelées ‘‘compte militaire’’. C’est ainsi qu’on a vu plusieurs taxes que l’Etat devait gagner s’effriter avec la bénédiction des militaires.
Comme si cela ne suffisait pas, les militaires se présentent régulièrement à l’aéroport et interviennent pour que les matières premières (Coltan et cassitérite) soient embarquées sans frais en soutenant qu’elles appartenaient aux militaires.
La question qu’il convient alors de se poser est celle de savoir s’il était autorisé, même pour un seul instant, aux militaires de trafiquer les matières premières ? Plusieurs conflits aujourd’hui sont actuellement attisés ou jugés par les militaires dans les sites miniers du territoire de Shabunda ; et cela n’est pas l’œuvre généralement des sous officiers, mais des officiers et cadres de l’armée congolaise.
L’exemple le plus éloquent est celui des carrières de Benzia occupées par les FARDC de la 18ème Brigade et ceux venus directement de la 10ème Région Militaire.
De leur part, les services générateurs des recettes qui sont à pied d’œuvre à Shabunda se butent depuis le 23 juin 2008 à la résistance, du reste légitime, des opérateurs économiques qui se sont décidés de ne plus continuer à payer les taxes étant entendu que les services de l’Etat du territoire de Shabunda ne délivrent pas des quittances et pour tant, nous avions suivi le discours du Ministre des finances qui s’était engagé pour leurs fournir des imprimés de valeurs identiques sur toute l’étendue du pays.
Par rapport à cette question, le bureau sur le terrain de ACADHOSHA avait officiellement écrit en date du 13 juillet 2008 à l’Administrateur du territoire pour se plaindre contre la taxation sans document des agents de l’Etat et lui demander de s’impliquer pour résoudre cette situation et arriver à rétablir la légalité dans ce secteur.
Pour tenter d’échapper à ces reproches de percevoir des taxes sans document, les agents percepteurs viennent d’instituer une stratégie consistant à délivrer les photocopies au lieu des imprimés de valeur en original. Et sur une même pièce, ils se donnent le luxe d’inscrire plus de 9 personnes en gardant le même montant que devait payer un seul individu.
Pour la simple illustration, le service de l’environnement du territoire de Shabunda avait délivré en juillet 2008 une photocopie comme preuve de paiement à 9 personnes. Chacune d’elle avait payé 43000 Francs Congolais, mais l’agent n’a inscrit sur la pièce que 43000FC comme frais encaisser. Les contrats chinois résoudra-t-il tous les problèmes du Congo ? N’est-il pas nécessaire que l’on s’implique dans la mobilisation des recettes internes ?
ACADHOSHA asbl pense que si l’on se déterminait à mettre du sérieux et stopper les hémorragies financières, on peut arriver à renverser le paradoxe ‘‘Congo pays plus riche, mais dont les populations sont extrêmement pauvres’’ qui nous colle aujourd’hui.
TERRITOIRE ET COLLECTIVITÉ : QUI DOIT PERCEVOIR LES TAXES ET QUI DOIT RETROCEDER ?
Au moment où nous plaidons pour que les recettes soient maximisées en territoire de Shabunda, il s’observe actuellement une situation qui devait interpeller l’autorité compétente.
En effet, depuis la promulgation de la loi sur la libre administration des provinces et les entités administratives décentralisées, le Chef de Collectivité des Bakisi a demandé au territoire de ne plus percevoir les taxes car c’est la collectivité qui est reconnue comme EAD. La question que toute personne avertie devait se poser est celle de savoir si prochainement Shabunda, eu égard à sa densité, ne sera pas une commune rurale dotée de la personnalité juridique ? A l’heure actuelle c’est la collectivité qui perçoit les taxes et le territoire est aux abois. Il faudrait rapidement harmoniser ce dossier qui risquerait de provoquer la méfiance et parfois la suspension.
‘‘Il vaut mieux statuer sur un dossier avant le temps au lieu d’attendre qu’il s’envenime pour tenter de le traiter quand il sera tard’’
