Le devoir d'aider l'innocent
SOCIETE CIVILE DU SUD-KIVU
BUREAU DE COORDINATION PROVINCIALE
BP. 43 BUKAVU Tél : 98 62 39 22 Courriel : sociv_bureausk@yahoo.fr
REPUBLIQUE DEMOCRATIQUE DU CONGO
"Le devoir d'aider l'innocent"
Mémorandum adressé à la Commission du Sénat
en séjour de contact et d'informations à Bukavu au Sud-Kivu
Honoré Monsieur le Président de la Délégation et distingués membres de la commission sénatoriale;
Nous vous souhaitons la Bienvenue chez nous, au nom de toutes les Forces Vives du Sud-Kivu représentées ici par cet échantillon de la Société Civile/ Forces Vives du Sud-Kivu.
La société Civile/Force Vives du Sud-Kivu vous accueille au moment où des faits parlants agitent le quotidien des habitants de Bukavu. Pour votre information, dans la semaine de votre arrivée, trois paisibles citoyens ont été fusillées pour des banales altercations avec des gens en armes, fort heureusement elles s'en sont tirées et vous pouvez les visiter pour constater avec nous que l'insécurité est en son comble et réaliser que la vie des civils ici chez nous tient sur un fil qui s'appelle la volonté de ceux qui détiennent les armes.
Vous arrivez chez nous, honorables sénateurs au moment où la ville de Bukavu est divisée en deux, avec un quartier où une catégorie de citoyens s'arrogent le droit d'interdire à leurs co-habitants l'accès.
Cependant, c'est ici l'occasion pour nous de vous dire haut et fort qu'il n'existe pas de problème de cohabitation entre les communautés au Sud-Kivu encore moins entre la Société Civile du Sud-Kivu et les membres de la Communauté Banyamulenge comme d'aucuns le présentent, surtout que nombre d'associations ont leur champ d'action dans les fiefs qu'on peut appeler des Banyamulenge et que ceux-ci siègent régulièrement dans les réunions de la Société Civile.
Mais pour permettre à votre commission de disposer des points de vue de la Société Civile sur la situation des populations et le déroulement du processus de réunification au Sud-Kivu, nous allons nous arrêter sur les points suivants :
I. Le manque de sincérité et d'honnêteté du gestionnaire politique de cette partie du pays et la victimisation à outrance d'une certaine catégorie de la population,
I. 1. De la Gestion du pays
Le Rassemblement Congolais pour la Démocratie / Goma qui professe haut et fort qu'il détient l'imperium sur cette partie de la République ne veut pas réaliser que les faits de guerre ont laissé au sein de la population des blessures qui sont encore fraîches. Ce rejet de la part de la population est toujours considéré par le RCD/Goma comme une contre-propagande orchestrée par la Société Civile alors que l'incompétence de ses cadres et l'incapacité à gérer la chose publique y sont pour beaucoup. Au lieu donc d'analyser les faits froidement, une condamnation rapide des animateurs de la Société Civile et des réponses de violences sont adoptées comme système de gestion. A Bukavu, les tergiversations de cette composante sont perçues comme une manœuvre de fuir la sanction populaire à la suite des élections qui sanctionneront la transition. En outre, le RCD/ Goma énerve la population par des prises de position ou des déclarations en faveur de leurs parrains rwandais ( cas des sociétés prédatrices telles SCAR, MPC, SUPERCELL, RWANDATEL/ OCPT ...). Tous ces faits ne sont pas de nature à favoriser la paix sociale au Sud-Kivu.
I. 2. Victimisation à outrance
Parlant de la communauté Banyamulenge, la Société Civile estime que les leaders de cette communauté jouent trop aux victimes, ce qui contraste avec la majeure partie des populations civiles. L'analyse montre que
- ils possèdent les armes alors que les autres citoyens n'en ont pas,
- ils sont sur- représentés au niveau des institutions de la transition et de l'armée,
- ils sont une marchandise que vendent la communauté internationale et les autorités locales ( cas de la conférence de presse du Gouverneur de province a.i ce vendredi 2 avril 2004),
- ils favorisent la séparation des groupes nationaux en s'agglutinant dans une portion de la ville,
- ils se comportent en hooligans ( cas des étudiants qui portent des armes à l'école ou encore ceux qui appellent des forces de l'ordre et de sécurité chaque fois qu'un petit désaccord surgit avec leurs condisciples de classe ou d'école),
- les responsables politiques, militaires et de sécurité Banyamulenge ne défendent que les intérêts des membres de leur communauté comme si les autres citoyens n'avaient pas droit à la même attention Ceci les disqualifie aux yeux du reste de la population.
II. Des leaders qui intoxiquent la base;
La Société Civile du Sud-Kivu ne veut que la Paix, rien que la Paix et toujours la Paix :
Lorsque le 02 avril 2003, nous avons assisté par les médias interposés à la signature de l’Accord Global et Inclusif par toutes les parties à Sun-city nous pensions que tous les espoirs des uns et des autres étaient permis pour la Paix tant attendue et la réunification de la R.D. Congo.
Cependant, les animateurs de la Société Civile sont constamment objet de poursuite et des menaces de mort.
Ils assistent impuissamment à leur diabolisation par les tenants du pouvoir politique. Ceux-ci inoculent des contrevérités.
Ils insécurisent les Banyamulenge en les opposant à l'ensemble de la population.
Ils couvrent la présence rwandaise : chaque fois qu'on évoque cette question, ce sont les services de sécurité qui montent au créneau. Ainsi notre collègue, Charles SHABANI LUBONGA du Réseau Provincial des Organisations de Défense des Droits de l'Homme au Congo/ Sud-Kivu ( Reprodhoc /Sud-Kivu) croupit en prison ( après avoir été kidnappé à Shabunda, coffré au cachot de la DSR/ Bukavu pendant cinq jours et sans avoir été entendu ou verbalisé) pour avoir signalé dans un rapport destiné au Bureau de Coordination de la Société Civile la présence des éléments rwandais armés à Shabunda où il se trouvait comme gestionnaire de la section locale de l'Institut Supérieur de Développement Rural ( ISDR/ Shabunda). Nous ne pouvons comprendre que des congolais soient si allergiques à ce genre de signalement surtout que nous savons que la DDR est une priorité dans notre pays à cette période de transition. C'est également le cas de Monsieur Joseph MUNGANGA détenu ( depuis le15/03/04) dans les cachots de la BSRS au motif qu'il est redevable d'un rwandais. Et pourtant, le dossier suivait son cours normal au tribunal.
La lecture que la population de Bukavu fait de ces actes c'est que l'on cherche à l'entraîner dans des soulèvements qui hypothéqueraient la poursuite du processus de la transition. Car, elle n'est pas dupe pour s'attaquer aux personnes lourdement armées, longuement préparées avec des machettes, des lances, des couteaux ... comme une certaine opinion le laisse véhiculer.
III. La volonté délibérée d'œuvrer dans le sens contraire des engagements signés lors des différents accords.
Aujourd'hui les faits sur terrain, démontrent à suffisance que quelques fils de ce pays n'ont pas entièrement adhéré à l'esprit de la pacification et de la réunification du pays.
Des réunions continuent à se tenir dans des motels de la place pour préparer une entreprise d'autonomisation du Kivu, étant entendu que certains ex-rebelles et quelques aventuriers mafieux qui les soutiennent ne semblent pas avoir trouvé leur compte dans le partage des responsabilités issu des travaux du Dialogue intercongolais. Est-ce une raison vraiment suffisante pour continuer à endeuiller une partie du pays d'ailleurs la plus exsangue?
Dans le même ordre d'idées, le recrutement forcé des jeunes et l'existence des camps d'entraînement militaire, en dehors du processus national d'intégration de l'armée, ne peuvent être autrement perçus que comme signaux clairs de cette tentative de créer un espace des troubles dans l'Ancien Kivu. Comment comprendre qu'un individu aussi Colonel fut-il peut avoir pour sa garde personnelle toute une compagnie? Ne parle-t-on pas aujourd'hui de l'armée de Masunzu? Ou peut-être encore de la milice de X CIRIBANYA ?
La persistance de l'esprit des composantes pour le mouvement politico-militaire du RCD/Goma est une cause d'insécurité grandissante au Sud-Kivu. Les dernières notifications des chefs de groupements administratifs de MINEMBWE sont une bombe à retardement tant l'animosité qu'elle vient de générer est grande.
IV. Les Solutions.
Sans être exhaustifs, nous proposerons quelques pistes de solutions à la sortie de crise :
- Le rétablissement de l'autorité de l'Etat sur toute l'étendue du territoire national
- Le rétablissement de la Justice et la lutte contre l'impunité,
- La permutation des éléments de l'armée et la police ainsi que la mise en place d'une justice militaire conséquente
- La présence significative d'une armée nationaliste et capable de défendre la Nation et les Citoyens,
Le renforcement de la Société Civile par des subventions de l'Etat pouvant permettre à notre composante de mener en toute indépendance des actions de consolidation de la paix et des activités favorisant la convivialité entre les citoyens. Souvent, les organisations internationales qui œuvrent dans ce domaine ont des visées qui ne cadrent pas avec les intérêts de la population. C'est ici l'occasion de rentrer sur les difficultés qu'engendrent certaines organisations venues par le fait de guerre tels l'Institut Vie et Paix et CECI-ACIPA. Nous demandons à tous ceux qui aiment le Sud-Kivu, et nous pensons que les Honorés Sénateurs sont de ceux-là, de décourager et de condamner de telles initiatives barbares conçues pour contrecarrer les acquis de l’Accord Global et Inclusif et de la Constitution de la Transition.
La paix au Sud-Kivu est tributaire de la réhabilitation des victimes des guerres. Pour cela nous demandons au Gouvernement de Transition de soutenir les efforts de la Société Civile par le financement d'un programme national de reconstruction pour le bien-être des populations paupérisées à outrance par les guerres absurdes et criminelles nous imposées par des maffias de tout bord.
Nous voulons la Paix, rien que la Paix et toujours la paix.
Fait à Bukavu, le 4 avril 2004
Pour la Société Civile du Sud-Kivu
