5è Forum Social Mondial : Au CENADEP, échange entre l'animateur principal du FADOC- Kinshasa et les associations de base sur ses impressions de Porto Alégré

Ce mercredi 03 mars 2005, le Centre National d’Appui au Développement et à la Participation Populaire, CENADEP, a organisé une séance publique de partage avec les organisations communautaires de base sur la participation de son délégué au Forum Social Mondial du 26 au 31 janvier 2005.

Ce partage a été axé sur les impressions de l’Animateur Principal du FADOC en rapport avec le mouvement social Brésilien.

1. Accueil des participants

L’Animateur a commencé par accueillir les participants à cette séance, venus nombreux l’écouter en cette après midi du 03 mars 2005 dans le cadre habituel des rencontres entre le programme FADOC et les Organisations Communautaires de Base.
Profitant de l’occasion, il a remercié le Bourgmestre de la Commune hôte de Kinshasa qui a accepté de rehausser personnellement de sa présence cette cérémonie.
Les remerciements sont allés aussi à l’endroit de Directeur Général de Solidarité Socialiste, Monsieur Jaques Bastin et la Chargée de Partenariat avec l’Afrique centrale et Lusophone à SOLSOC, Madame Sylvie Demesteer, tous deux venus de Belgique pour une tournée de visite de terrain en République Démocratique du Congo ainsi qu’à Valérie Vandervecken, Représentante de Solidarité Socialiste en RDC.

2. La participation du CENADEP au Forum Social Mondial

Après avoir présenté le Forum Social Mondial comme une espace de rencontre et de convergence des différentes associations de la société civile du monde entier ayant en comme une vision d’un autre monde plus juste, équitable où les faibles ne sont point écrasés par ceux qui se disent “ forts ”, comme un espace de libre expression des peuples de toutes les régions du monde, Danny Singoma a précisé qu’il a participé à ce Forum dans le cadre du partenariat qu’entretient l’ONG internationale Belge Solidarité Socialiste, et le CENADEP où il est Responsable du Programme de Formation et de Dynamisation des organisations communautaires de base.

J’ai participé à la 5 édition du Forum Social Mondial qui s’est tenue à Port Alegre au Brésil, à votre nom. Vous des quartiers populaires de Kinshasa. Je crois que vous me le concédez, a demandé l’Animateur. Un oui massif a retentit dans la salle.

Je n’étais pas seul. Nous formions une équipe bien soudée de 6 personnes:
- Sylvestre Kambaza du PREFED-RDcongo
- Charles Aimé Ki du Burkina Faso
- Edouard Mokemo de BUACO de Bolobo (Province de Bandundu/RDCongo)
- Gladys Cifuentes, de Solsoc
- Ines, Brésilienne.
- Et moi, Danny Singoma du CENADEP-RDCongo.

Présentant la banderole accrochée à une fenêtre de la salle, il a posé la question de savoir ce qui y est écrit. Une personne dans l’assistance a répondu : FORUM SOCIAL MONDIAL, REPUBLIQUE DEMOCRATIQUE DU CONGO, UN AUTRE MONDE SANS GUERRE, SANS FAMINE EST POSSIBLE.

C’est bien. C’est ça la banderole que j’ai amenée dans mes valises jusqu’à Porto Alegre. Ce message est celui que nous avions livré dans ce concert où chacun avait le sien par rapport à la situation de son groupe, de sa communauté, de sa ville, de son pays, de son continent ou du monde.

Pendant une semaine, il était organisé des espaces des discussions, des séminaires, des échanges d’expériences, des expositions, des manifestations culturelles qui tous avait un même but : le refus d’un monde dominé par l’impérialisme qui veut se libérer par la solidarité internationale.

Le Forum a débuté le 26 mars par une grande marche. La marche de ceux qui veulent d’un autre mode plus juste et qui croient qu’il est possible ! Au cours de cette marche de 200.000 personnes sur une distance de plus ou moins 5 km, j’avais ma banderole en main ; Un ami burkinabé et une brésilienne m’aidaient à la porter. Cela était aussi un signe pour dire que le message que nous avions n’était pas celui des congolais mais celui de tout le monde.
Mes amis du Congo portaient une autre banderole avec un autre message de Paix pour le Congo, l’Afrique et le monde et une colombienne les aidaient à porter la banderole.

Nous avions une chance extraordinaire. Parmi plusieurs africains et congolais qui étaient au Forum. Comme vous le savez, nous étions chacun supporté par son partenaire, surtout européen. Les autres africains et congolais (pas tous, bien sûr) devraient rester sous les couleurs de leurs partenaires qu’ils affichaient. Il était difficile de savoir de quel pays ou de quelle organisation ils venaient. Ce n’est pas très grave. Néanmoins sachez que d’autres congolais étaient aussi présents au Forum Social Mondial.

Nous avions marché dans les très belles rues de Porto Alegre sans bousculade ni dérangement de la Police. Les uns chantaient, les autres criaient, ceratins autres couraient… C’était la libre expression. Mais dans la discipline.

Après la marche, le lendemain, le 27 janvier2005, le travail avait alors très bien commencé avec des séminaires sur différents thèmes. Les séminaires se déroulaient sous des tantes bien aménagés sur un grand espace de ce qui était autre fois un port et une usine de café.

Il y avait énormément d’activités au Forum et il fallait donc savoir bien arranger son temps pour ne pas être débordé ou tout perdre.

Notre délégation avec celle des autres amis de Mensenbroeders (Frères des Hommes, une ONG Belge), ,nous avions eu aussi à animer un séminaire sur : Les réseaux comme structure durable de communication ». C’était le dimanche 30 janvier 2005. C’était très intéressant pour moi de parler de vous. De parlerdu CODHOD et de tout le travail que nous faisons ensemble. Ce séminaire était animé par Sylvestre Kambaza de Prefed RDC qui a parlé de la Société Civile congolaise ; il y avait aussi une argentine, un brésilien, un colombien, une sud-africaine…

Après ce séminaire, le dimanche, nous sommes allés en compagnie de Gilberto qui conduisait la délégation de Mensenbroeders, à plus de 100km de Porto Alegre pour visiter le Mouvement des Sans terre brésiliens. Impressionnant. Nous avons trouvé ce jour là qu’ils avaient préparé la nourriture pour 2.000 personnes. Il y en avait à vous couper le souffle.
Ils nous ont fait visiter leurs champs de riz ; Un riz exceptionnel et cultivé dans des conditions exceptionnels. Sans engrais, sans tracteur… Nous en reparlerons prochainement.

Le Forum Social Mondial, il y a beaucoup à dire. Je l’ai fait avec vos animateurs le 21 février. J’y reviendrai encore dans vos associations. Comme la Société Civile d’en haut organise le forum Social congolais, nous, nous allons organiser le forum social de Kinshasa. N’est-ce pas ? (Encore un oui massif).

3. Les impressions de l’Animateur

Parlons maintenant de ce qui m’a marqué dans ce voyage.

a. l’Aéroport de Ndjili

Ce qui m’a le plus frappé, c’est d’abord notre aéroport. Des tracasseries au départ et au retour. La chaleur dans les installations, l’attitude des policiers, etc. Il ya beaucoup à dire. Plusieurs savent ce qui se passe à Ndjili.
Quand on voit un jeune partir, on se dit c’est fini ! Il ne reviendra plus. Quand vous revenez, on se rue sur vous, vous avez l’argent ou des bien précieux…

b. les aéroports du Brésil
Quelle beauté des installations ! Pas de tracasseries ; les policiers sont au service des passagers, ils vous renseignent en cas de besoin. Le retrait des bagages sans problème, Les taxis à l’extérieur, en parfait état….

c. la ville de Porto Alegre
Le Brésil est un pays du tiers-monde comme la RDcongo. Il est trois fois plus grand que la République Démocratique du Congo. Les caractéristiques du sol sont presque les mêmes qu’ici. Il a aussi connu la dictature. Il est un Etat fédéré. Porto Alegre est la capitale d’un des Etats du Brésil, l’Etat de Rio Grando do Soul.
Une très jolie ville, très propre et les habitants sont très fiers de la propreté de leur ville.

c.1. La salubrité
Contrairement à ici chez nous, vous ne trouverez point des saletés qui traînent dans la rue. Pas même des eaux stagnantes. Des poubelles existent partout et bien marqué pour le tri des déchets. Les gens sont informés sur tout ça. Le soir vous remarquez vers 18 heures des sacs à ordures dehors et quelques instants après ils ont disparus. Ils ont été ramassés par les ramasseurs. Et ces ramasseurs, ce sont souvent des associations, des groupes d’individus qui s’organisent et ils sont payés pour ça.

Imaginez-vous la grande marche de l’ouverture. 200.000 personnes marchent en mangeant des biscuits, en buvant de l’eau, en jetant des papiers. Vous repassez sur l’itinéraire de la marche quelques heures après, la voie est aussi propre que celle qu’on inaugure. C’est vrai, je vous dis.

Les taudis, les bidonvilles existent aussi là ; Mais ils sont plus propres que nos quartiers ici. Vous vous imaginez le téléphone, l’eau et l’électricité dans les bidonvilles !!!

Comparez par vous-même avec Kinshasa. Je ne commente rien…

c.2. Le transport en commun

Ça alors ! Aucune comparaison avec chez nous. Des taxis, il y en a alors. Tous ont une couleur uniforme, un numéro d’identification et munis des radiphonies ; Chaque chauffeur affiche son macaron avec son identité. Ils sont polis, les chauffeurs de Porto Alegre. Pas comme « les insolents » de Kinshasa.
Des bus, n’en parlons pas ! Ils se déplacent mêmes vides ; Ils sont ponctuels. Et tout le monde paie son ticket excepté les vieillards, les anciens militaires. Ils ont des permis spéciaux. Et tout le monde les respecte. Contrairement à Kinshasa, les gens s’alignent pour monter. Chacun respecte l’ordre d’arrivée. On ne se précipite pas et on cède la place au plus âgé. Les vieux bus, je n’en ai point vu ! D’ailleurs sur certains bus on écrivait : moteur écologique. Et chose curieux : tous ces bus sont fabriqués au Brésil. (sous - licence).

c.2. L’alimentation
Là c’est comme si je rêvais ! Dans presque tous les restaurants où nous mangions, un buffet libre coûte l’équivalent de 3 $. Ce que nous achetons ici à 20$ et plus. Les gens mangent alors et bien encore. Des produits frais, produits au Brésil. L’agriculture fonctionne bien.

Au Brésil, les gens connaissent la valeur de la Terre. Je vous ai parlé du Mouvement des Sans Terre, ce sont des gens qui se sont battus pour avoir le droit à la terre. Et ils l’ont eu. Et il l’exploite alors convenablement.

C’est chez nous que nous négligeons la terre. Nous nous contentons de consommer tout ce qui vient de l’extérieur : des conserves, des poulets et des poissons surgelés, certains sont même d’origine inconnue.

La terre, mes chers frères, c’est la plus grande richesse pour un homme et pour un peuple. Ne pas la rentabiliser, c’est accepter sa mort et la domination. Ce n’est pas juste que le congolais importe toute leur alimentation, tous les OGM du monde ; Il faut que cela change. Nous en reparlerons

c.3. le Forum Social Mondial

Le Forum était une vraie histoire des habitants de Porto Alegre. Ils s’en sont appropriés. C’était visible.
Vous voyez le macaron que je porte. Il nous a été remis lors de l’accréditation au Forum Social Mondial. Tout le monde le connaissait. En voyant ce macaron, l’homme de Port Alegre vous donnait une certaine considération.
Sur les immeubles, le devant des restaurants et des bars, les lieux publics, on voyait partout les inscription du Forum Social Mondial.

Ecoutez ceci : la Mairie de Port Alegre a déboursé pour le Forum Social Mondial un montant de 700.000 dollars. Vous vous imaginez le montant. Sûrement qu’il a récupérer son argent d’une manière ou d’une autre. Avec tous ces visiteurs dans la ville.

d. Les noirs du Brésil
Les noirs, il y en a au Brésil. Des brésiliens noirs. En majorité des anciens esclaves. L’esclavage a été aboli dans ce pays presque en dernier lieu au monde. On sent encore aujourd’hui que les noirs ont besoin de beaucoup lutter pour s’affirmer. Une raison de plus pour qu’ils manifestent au Forum Social.
Le Mouvement des Sans Terre dont j’ai parlé est principalement constitué d’Afro descendants. Les noirs au Brésil étaient très heureux de voir d’autres noirs du monde au Forum et au Brésil. Cela leur donnait espoir pour un monde où ils auraient plus de place

e. Les associations du Brésil

Les associations au Brésil sont présentes et vivantes. Elles travaillent et sont organisées.
Ce qui ma beaucoup marqué c’est la place des associations dans l’économie solidaire.
Vous voyez mon chapeau, ce t-shirt que je mets, ce sac. Tout ceci a été produit par les associations. Leurs produits concurrencent même celles des industries capitalistes. Elles ne se contentent pas comme nous de produire des biens que personne ne peut consommer si ce n’est par pitié.
Nous avons aussi des gens qui savent réfléchir, inventer, concevoir,… ce qui nous manque c’est de bien le faire avec l’esprit en tête que c’est pour notre développement et notre bien-être. Ne travaillons plus comme pour les autres, pour plaire nos bailleurs. Travaillons pour nous et nos compatriotes.

Au Forum on pouvait bien remarquer les ONGs, les associations brésiliennes avec le fruit de leur travail.

4. Echanges sur le sujet du jour

Après l’intervention de Danny Singoma, l’assistance a échangé avec lui sur le bienfait de la restitution, la collaboration entre l’autorité communale et les associations, le Fonds FADOC, le travail en réseau, le rôle des associations dans l’économie solidaire congolais, etc.

Prenant la parole, le Bourgmestre de la Commune de Kinshasa s’est dit émerveiller par l’exposé de Danny Singoma. Il a dit soutenir tous les propos de l’Animateur et a insisté sur la bonne collaboration qui doit régner entre les associations et l’autorité pour relever les défis qui se posent à nous tels que relevés par Danny Singoma :
- la salubrité : c’est honteux de remarquer comment nos rues sont salles ; Cette rue n’est que victime de l’industrie familiale de production d’ordures ménagères. Les moustiques, les eaux stagnantes, tout cela doit être combattu. Serrons-nous les coudes.
- L’alimentation : manger devient une gymnastique extraordinaire à Kinshasa et pourtant nous avons tous les atouts pour une autosuffisance alimentaire.

Le bourgmestre a terminé en insistant sur le travail en harmonie avec la commune pour le développement des entités décentralisées.

5. Mot du Directeur de Solidarité Socialiste

Le Directeur de Solsoc, Monsieur Jaques Bastin, invité à prendre la parole, a complété l’exposé de Danny en insistant sur la définition du Forum Social Mondial, son organisation, sa charte et la participation à ses éditions. Il a insisté sur le fait que le Forum Social Mondial est une continuité des différents Forums locaux, thématiques, régionaux qui se tiennent tous les temps dans le monde. Le Forum Social Mondial a une édition chaque deux ans. La 6 édition pourra, si tous s’accordent, se tenir sur le continent africain en 2007.
Le Forum est un espace de rencontre des associations de la société civile du monde qui refusent la domination de l’impérialisme sous toutes ses formes. Vous devez aussi poursuivre dans ce même ordre d’idée en sachant mener votre combat qui n’est nécessairement le même que celui des autres. Déjà comme nous sommes là, tout ce que fait le CODHOD dans les quartiers, c’est l’image du Forum.

6. Fin de la cérémonie.

Pour terminer, l’Animateur Principal du FADOC a convié l’assistance à partager un verre de jus de fruit.
« Ceci pour vous apprendre à consommer les produits de nos champs et non à nous ruer jour et nuit sur le Coca-Cola dont nous ne connaissons ni la formule, ni l’origine. Si à chacune de nos manifestations, au lieu d’acheter le Coca-Cola ou les poulets surgelés importés, nous fabriquons nos propres jus de fruits locaux et préparons les poulets élevés dans nos parcelles, ne pensez-vous pas que nous encouragerons la production locale et le revenu de plusieurs d’entre nous ? »


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