Agressions des ressortissants Congolais en France : Lettre du COJESKI/FRANCE à Monsieur Nicolas SARKOZY, Ministre Français de l'Intérieur
Monsieur Sarkozy
Ministre de l’Intérieur
et de l’Aménagement du Territoire
Place Beauvau
75008 Paris
N/Réf. : LO/2005/03/CF/CB
Agressions de ressortissants congolais
Demande :
- De suivi d’enquêtes
- et d’avertissement et surveillance
des auteurs de ces agressions
Paris, le 15 septembre 2005
Monsieur le Ministre,
Nous avons l’honneur de vous adresser la présente lettre ouverte pour dénoncer la multiplication de certaines agressions graves envers les membres de la Communauté congolaise et faire appel à votre vigilance pour que ces agressions soient identifiées, reconnues et sanctionnées le cas échéant.
Le COJESKI est un réseau national de 340 associations de jeunes œuvrant en République démocratique du Congo depuis 1995. Plusieurs bureaux de représentation sont implantés hors de RDC, dont un en France. Nous jouissons de la personnalité juridique, du statut d’Observateur auprès de la Commission africaine des droits de l’Homme et des Peuples/Union africaine et du statut consultatif spécial auprès du Conseil économique et social des Nations Unies (ECOSOC).
Nous sommes, Monsieur le Ministre, extrêmement inquiets des violences et de la haine dont sont victimes les membres de la Communauté congolaise de France depuis que certains acteurs politiques originaires de RDC ont décidé de faire de la capitale française leur quartier général. Selon les informations qui nous sont parvenues, l’Apareco (Alliance des patriotes pour la refondation du Congo) financerait les actions des associations « Toponi Congo », basée à Paris et « Bana Congo », basée à Bruxelles, et les utiliserait pour intimider, menacer voire agresser les personnes ne partageant pas leurs convictions et particulièrement les membres des partis politiques rivaux.
En effet, l’enquête que nous avons effectuée, nous a permis de recenser les incidents suivants :
• le 30 juin 2005 :
- Jacques Kitchindja et Constat Lomata, tous deux originaires de l’est de la RDC ont été agressés au Trocadéro par des manifestants portants les Tee shirts de l’Apareco. Motif de leur agression : ils sont accusés d’être membres du PPRD, parti politique du président Kabila ;
- Chiyembe Mwila aurait été agressé par les membres d’Apareco, entre l’Ambassade de la RDC à Paris et le métro Alma Marceau. Motif de son agression : ses agresseurs lui reprocheraient d’avoir accepté d’assister à la réception organisée par l’Ambassade à l’occasion du 45e anniversaire de l’indépendance de la République démocratique du Congo ;
- Deux autres personnes auraient également été agressées par les mêmes membres de l’Apareco et de l’association « Toponi Congo » ;
• Le 22 juillet 2005 se déroulait une manifestation de l’Apareco entre Château Rouge et République. À la même date avait lieu une conférence de presse de Vital Kamerhe. Au sortir de cette conférence, les événements suivants se sont produits :
- Yves Kambala a été agressé devant la salle où Vital Kamerhe, Secrétaire général du PPRD, intervenait ;
- Mabeko, rédacteur en chef de magazine HP, a été agressé dans les mêmes circonstances qu’Yves Kambala ;
- Hadji Dimittri à été attaquée à la bombe lacrymogène et évacuée par les membres de la police nationale présents sur les lieux ;
- Vital Kamerhe lui-même a été agressé et évacué par les forces de police de la salle Eurosite, 69 ter rue de la Chapelle. Il semblerait que les agresseurs revenaient de la manifestation de l’Apareco déjà citée.
• Par ailleurs et à plusieurs reprises :
- Jean-Paul Kasende a été victime par téléphone de menaces de mort et de disparition de la part d’un certain « Guy, vice-président de Toponi Congo » ;
- Rouf Mbuta Nganga a été victime de menaces téléphoniques pour avoir répercuté le déroulement de la conférence de Vital Kamerhe sur la radio « Africa N°1 ». Les agresseurs revenaient également de la manifestation de l’Apareco.
Aujourd’hui, plusieurs dizaines de Congolais de l’agglomération parisienne craignent pour leur sécurité face à ces violences sauvages que nous condamnons rigoureusement.
Monsieur le Ministre, au regard de tout ce qui précède et considérant le climat politique qui règne en République démocratique du Congo, nous vous prions instamment de bien vouloir :
• Prêter attention personnellement cette affaire et suivre les enquêtes ouvertes sur ces agressions pour en punir les auteurs et éviter que Paris ne devienne un terrain de règlement de comptes pour ces groupuscules d’agitateurs ;
• Prendre contact avec les partis politiques congolais représentés en France pour les mettre en garde contre les débordements de leurs membres pour préserver la sécurité des ressortissants congolais.
Nous tenons à rappeler à l’ensemble de la classe politique congolaise et particulièrement à Ngbanda-Nzambo Ko Atumba (fondateur et président de l’Apareco), à qui une copie de ce courrier sera adressée, que la République démocratique du Congo ne peut prétendre aspirer à la démocratie si elle est incapable de respecter la déclaration universelle des droits de l’Homme dont elle est signataire.
Citons à cette occasion les deux articles suivants qui en sont extraits :
• « Tout individu a droit à la liberté d’opinion et d’expression, ce qui implique le droit de ne pas être inquiété pour ses opinions et celui de chercher, de recevoir et de répondre, sans considérations de frontières, les informations et les idées par quelque moyen d’expression que ce soit » (Art 19) » ;
• « Toute personne a le droit à la liberté de réunions et d’association publique », « Nul ne peut être obligé de faire partie d’une association » (Art.20, alinéas 1 et 2).
Attachés aux valeurs républicaines de l’État français, dont la liberté d’expression constitue l’un des aspects les plus nobles, nous serions extrêmement peinés de voir son territoire transformé en champ de bataille par des individus incapables d’en apprécier la juste valeur.
Convaincus que vous réserverez une suite favorable à notre requête, nous vous prions d’agréer, Monsieur le Ministre, nos très respectueuses salutations.
Christophe Bintu Musharamina
Représentant du Cojeski RDC en France et en Europe
Copie :
- Son Excellence Jacques Chirac
Président de la République française, Paris
- Son Excellence Edi Angulu
Ambassadeur de la République démocratique du Congo en France, Paris
- Dominique de Villepin
Premier Ministre de la France, Paris
- Philippe Douste-Blazy
Ministre des Affaires étrangères de la France, Paris
- Pierre Mutz
Préfet de Police de Paris
- Geneviève Sevrin
Présidente d’Amnesty International, section française, Paris
- Sidiki Kaba
Président de la Fédération internationale des ligues des Droits de l’Homme (FIDH), Paris
- Jean-Pierre Dubois
Président de la Ligue des Droits de l’Homme, Paris
- Fernandez Murhola
Coordonateur national du COJESKI-RDC à Kinshasa
- Pierre-Dominique Schmidt
Ambassadeur de Belgique en France
- Bureaux de représentation du COJESKI en Europe
- Organisations de la société civile de la République démocratique du Congo
- ONGs congolaises des droits de l’Homme ;
- Partis politiques congolais
