RD Congo : JPDH exige toute la lumière sur les rafles opérées lors d’une marche pacifique à Kinshasa

Journaliste pour la promotion et la défense des droits de l’homme, (JPDH), organisation indépendante de défense des droits de la personne, de lutte contre l’impunité et de développement démocratique reste préoccupé par l’issue de la marche organisée le 30 juin 2005 à Kinshasa (capitale de la RD Congo), à l’initiative de l’opposition politique, avec en tête, l’Union pour la démocratie et le progrès social (UDPS - principale formation politique de l’opposition au pays) en vue d’exiger la fin du fonctionnement des institutions politiques conformément à la Constitution ayant régi la transition en République démocratique du Congo. Les forces de l’ordre déployées pour disperser les manifestants avaient recouru aux moyens disproportionnés, usant- selon des témoins des ONG de défense des droits de l’homme - des armes à feu. La brutalité policière a été matérialisée par des cas d’arrestations suivies d’actes cruels, dégradants et inhumains infligés sur des personnes arrêtées avant d’être relâchées des cachots où elles ont été conduites.
Le vice-président de l’Udps/Benelux, Félix Tshisekedi, fils du leader historique du parti, Etienne Tshisekedi, en séjour à Kinshasa, et Gaston Dindo, Directeur de campagne de l’Udps, avaient échappé à la mort, avant, pour le second, de trouver refuge dans une des résidences du premier président du jeune Congo indépendant, Joseph Kasavubu, dans la commune de Kasavubu (Centre ville à Kinshasa). Dans la foulée d’arrestations, nombre de femmes ont été brutalisées avant d’être soumises à des pratiques honteuses proscrites par les lois de la République. A cette marche, étaient aussi associés les activistes des mouvements associatifs proches des leaders politiques. Si les uns ont été relâchés après une séance des tortures, les autres cependant, ne donnent plus signe de vie. Le Groupe MONGALA MPE MOTO, une association culturelle regroupant les déplacés de guerre venus et ressortissants de la province de l’Equateur (Nord-Ouest), cantonnés sur le site Nganda Mosolo, dans la commune urbano-rurale de la Nsele (Est de Kinshasa), avait saisi par écrit les autorités de la Police nationale congolaise (PNC) avec ampliation aux organisations non gouvernementales de défense des droits de l’homme (ONGDH) au lendemain de cette répression. Cette structure socio-culturelle exigeait des éclaircissements sur la détention prolongée de sa fondatrice, du nom de Virginie MAYAZA, déplacée de guerre venue de Gbadolité, née le 16 janvier 1973, mariée et mère de cinq enfants, comptée parmi les têtes de peloton lors de la marche. Selon les informations parvenues à JPDH confirmées par quelques hébergés du site Nganda Mosolo, le Groupe MONGALA PE MOTO a été l’une des structures affiliées au Mouvement de libération du Congo (MLC-parti du Vice-président de la République , Jean-Pierre Bemba) et candidat malheureux au second tour de l’élection présidentielle intervenue le 29 octobre 2006. L’association s’était désolidarisée de son allié politique pour « promesses non tenues ».
JPDH a appris que Mme MAYAZA a été arrêtée dans la foulée de manifestants et embarquée dans une jeep non immatriculée et appartenant à la Police nationale congolaise (PNC) en direction de l’Inspection provinciale de la Police /Kinshasa (IPK) où l’ensemble des personnes arrêtées devraient être verbalisées.
Selon des témoignages donnés par ses collègues de fortune relâchés et que JPDH a pu joindre, Virginie MAYAZA avait été entendue sur procès-verbal et devrait, par la suite, être signifiée de son sort. A en croire sa famille, Mme MAYAZA n’avait toujours pas regagné la maison et ses cinq enfants Sisi Mboke, Ketyra Mboke, Adijo Mboke, Jean-Jacques Mboke et Fernando Mboke, traumatisés, ont disparu de la circulation de peur de représailles. Son mari, Epiphanie Mboke a été, selon sa belle-famille, arrêté le 28 juin, soit deux jours avant la marche, accusé d’avoir motivé les membres de « Mongala pe Moto » à exiger la fin de la transition politique. M. Mboke avait été l’objet des traitements dégradants dans sa cellule de détention, avant de décéder de suite des tortures. Dans une lettre adressée au gestionnaire du site Nganda Mosolo en date du 23 octobre 2006, au nom et pour le compte de la famille, dont copie a été transmise à JPDH, M. MILANGA LAZARE, l’oncle de l’infortunée, habitant sur l’avenue Bukaka n°445, commune de Bandalungwa avait reconnu que sa nièce MAYAZA avait fui la guerre à Gbadolite avant de se retrouver au site de la Nsele pour y être hébergée avec ses cinq enfants. Dans sa correspondance, Lazare Milanga a déclaré avoir effectué des déplacements en vain à Nganda Mosolo pour retrouver les traces de sa nièce. Au gestionnaire du site, il a demandé de l’aider en menant des enquêtes car, écrit-il, la disparition prolongée de Mme Mayaza et ses enfants jette la famille dans l’incertitude. A la base des pressions de la famille de l’infortunée, le gestionnaire du site avait écrit au Représentant du Comité international de la Croix Rouge en République démocratique du Congo (CICR) à Kinshasa, structure d’appui aux déplacés, en date du 25 octobre 2006 pour exprimer les inquiétudes des proches de Mayaza. Cependant, le gestionnaire du site, également pasteur, avait fait foi à la déclaration d’un de ses fidèles, en séjour à Kinshasa, qui avait indiqué avoir vu Mme Mayaza sur le sol britannique, précisément à Manchester. Tout en attendant de réunir tous les éléments d’enquête, M. Mavinga avait sollicité l’appui du CICR pour vérifier l’information portée à sa connaissance par son fidèle. A l’oncle de la fondatrice MONGALA PE MOTO, le gestionnaire du site avait répondu, dans sa correspondance datée du 30 octobre 2006 dont JPDH a pu se procurer une copie, qu’après investigations, Mme Mayaza et ses cinq enfants étaient absents depuis plus d’un an et demi du site d’hébergement . Il a invité les membres de la famille de Mayaza à à effectuer des recherches parallèles. Pour sa part, le Département Enquêtes et Investigations de JPDH a pu obtenir le listing des hébergés du site Nganda Mosolo auprès du gestionnaire dudit site, le pasteur MAVINGA TUBU Joseph. JPDH est en mesure de confirmer que les noms de Virginie MAYAZA et ses enfants étaient repris sur la liste à la 15ème position.Eu égard à ce qui précède, JPDH : dénonce la violation de la Constitution de la République , spécialement en son article 26 qui dispose que la liberté de manifestation est garantie ; condamne la violation de l’article 30, litera 2, qui dispose qu’aucun Congolais ne peut être ni expulsé du territoire de la République , ni être contraint à l’exil, ni être forcé à habiter hors de résidence habituelle ; à l’hypothèse où Mme Mayaza aurait fui le pays pour échapper aux actes de représailles de la part de ses services de sécurité ; exige la mise sur pied d’une commission d’enquête en vue d’élucider les circonstances de la mort de M. Mboke et établir les responsabilités ; exige que toute la lumière soit faite sur le cas MAYAZA et que ses rejetons, portés disparus, retrouvent leur domicile en toute quiétude.
Fait à Kinshasa, le 20 novembre 2006
Journaliste pour la promotion et la défense des droits de l’homme, (JPDH)