Ce téléphone m’appartient

En République Démocratique du Congo, Si Jeunesse Savait (SJS), une association des jeunes féministes se préparent à lancer la campagne téléphone oyo eza ya nga, entendez, ce téléphone est à moi. Une façon d’affirmer haut et fort que les droits des femmes s’étendent également aux usages qu’elles font de la technologie et que ces droits devraient être respectés.
Car qui dans ce pays n’a jamais entendu d’une femme qui a eu des ennuis par ce que son mari a lu ses messages et en a trouvé quelques-uns qu’ils n’appréciaient pas ?
De plus en plus, au marché, à l’église, des femmes et filles désespérées, tendent leurs téléphones à des inconnues et leur demandent suppliantes de confirmer à leurs partenaires au bout du fil qu’elles sont bien à l’endroit où elles prétendent être au téléphone.
Les chanteurs s’en donnent à cœur joie ; ils composent des chansons dénonçant les dérives des femmes qui mettent plusieurs minutes à répondre à leur téléphone, insinuant par la même occasion qu’elle serait en train de s’adonner à une activité qu’elle ne pourrait avouer à leurs copains au bout du fil.
Mais il est temps que les choses changent. il faut que les uns et les autres comprennent le harcèlement sexuel qui découlent de ces pratiques, de l’humiliation que les femmes vivent tous les jours quand elles doivent justifier de leurs moindres gestes, de leurs moindres actions. Beaucoup de gens sourient en recevant dans leurs boites des photos truquées de stars et autres vedettes de la chanson ou de la télé quand ce ne sont pas des femmes politiques en plein ébats. Mais très peu se soucient des conséquences d’un tel rabaissement sur les carrières des femmes qui peinent déjà à être traitées en partenaire égale dans le travail, la politique ou la vie de famille.
La campagne téléphone oyo eza ya nga que va mener Si Jeunesse Savait du 25 novembre au 10 décembre 2009 sur les radios, télévisions et les journaux en ligne va permettre de s’attaquer à un vrai problème de société.
Espérons qu’au delà de la discussion, les services de protection classiques vont également réfléchir sur les moyens de punir des tels actes.