première distribution des vivres aux déplacées à Sake au Nord-Kivu
GOMA (RDCongo), 24 nov 2012 (AFP)
Appuyé sur sa béquille, la chemise déchirée et sale, Kuirwa Musafiru attend que sa famille soit appelée pour recevoir sa ration de nourriture dans un camp où il s'est réfugié après avoir fui les combats à Sake, dans l'est de la République démocratique du Congo.
"Je suis parti sans casserole, sans assiette, sans rien. On attend, on n'a toujours pas de nourriture", s'énerve le cultivateur de 52 ans qui a quitté la ville de Sake jeudi, avec sa femme est leur neuf enfants, à la suite des combats qui ont opposé le Mouvement du 23 mars (M23) à l'armée régulière.
Benoît, 17 ans, assis sur son vélo, attend que sa mère revienne avec de la nourriture. Lui aussi a quitté Sake jeudi. Soulagé de cette distribution, il déplore cependant l'absence de bâche. "C'est la saison des pluies et tout est inondé", constate-t-il en désignant la petite hutte en paille qu'il occupe avec sa famille.
A côté d'eux, une foule compacte et bruyante, principalement composée de femmes et d'hommes célibataires. Tour à tour, ils trempent leur doigt dans l'encre bleue et signent la feuille qui leur permettra d'obtenir un ticket de nourriture.
Puis, par petits groupes, les déplacés s'avancent afin de recevoir une ration de farine de maïs, de haricots, de petits pois et d'huile ainsi qu'un bloc de savon par famille et un bidon en plastique flexible qui leur servira à transporter de l'eau.
Des rations pour trois jours
"Nous distribuons une ration pour trois jours par famille", explique Wolfram Herfurth, coordinateur du PAM (Programme alimentaire mondial) dans le camp de déplacés voisin de Mugunga I. "Nous avons choisi de ne pas donner plus parce que les gens de Rutshuru commencent à rentrer chez eux".
"On ne veut pas qu'ils soient obligés de porter trop de nourriture sur la route et qu'ils soient volés en chemin", poursuit-il pendant que de lourds sacs de farine sont déchargés des camions du PAM et déposés sur des bâches à même le sol.
"La situation a empiré d'une manière dramatique depuis samedi. D'abord nous avons eu toutes les personnes à l'est de Goma qui sont allées dans la ville, puis il y a eu un second mouvement de personnes depuis mercredi, fuyant les combats à Sake", a expliqué à l'AFP Tariq Riebl de l'ONG Oxfam.
"Maintenant nous avons plus de 100.000 déplacés dans les camps autour et dans Goma, c'est assez dramatique. Beaucoup disent qu'ils ont surtout besoin de nourriture, mais également d'abri. Ils dorment dehors et quand il pleut cela rend les choses très compliquées pour eux". Les réfugiés qui avaient fui les camps situés au nord de Goma ont emporté leurs bâches mais les nouveaux dorment sans protection.
"Beaucoup de déplacés souffrent d'infections respiratoires, constate le docteur Marcel Lumbala du HCR, rencontré dans le camp de Mugunga III, plus ancien et mieux organisé. "Il fait très froid le soir, même sous les abris", dit-il.
23 ans, enceinte, 5 enfants
A quelques mètres, Salama Ndamoza, 23 ans, enceinte et entourée de ces cinq enfants, vient de recevoir sa ration.
"Depuis que je suis arrivée ici, c'est la première fois que l'on me donne à manger", explique la jeune mère qui a fui Kibumba, dans la région du Rutshuru, en mai dernier, pour le camp de Kanyaruchinya, situé au nord de Goma, avant d'arriver à Mugunga III dimanche dernier.
"Ce n'est pas assez", déplore-t-elle. "Avec une ration on va pouvoir manger ce soir et c'est tout", dit-elle.
"On est fatigué et mes enfants se sont blessés sur la route", explique la jeune femme qui, comme beaucoup d'autres réfugiés, se débrouille pour subvenir à ses besoins en ramassant du bois afin de le vendre dans le camp, puis acheter de la nourriture.
Le camp du Lac Vert comme celui de Mugunga I n'ont pas d'eau. Les ONG s'activent pour tenter de mettre en places de grosses poches en caoutchouc qui seront remplies par des navettes de camion-citernes. En tout, 135 tonnes de nourriture ont été distribuées samedi dans les 12 sites.
