Promotion et protection des droits de l'enfant

Monsieur le Président,

Le Comité international de la Croix-Rouge relève des progrès dans le domaine de la protection juridique des enfants victimes des conflits armés. 54 pays ont ratifié le Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l'enfant, concernant l'implication d'enfants dans les conflits armés. Cependant, le fait est que les enfants continuent d'être séparés de leurs familles, recrutés comme soldats, tués, blessés, violés, tous les jours, dans trop de pays. La situation des enfants victimes de la guerre est aussi grave cette année que précédemment.

Le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) puise dans son expérience opérationnelle les éléments nécessaires à une analyse permanente qui, à son tour, oriente son action en vue d'une amélioration de la réponse humanitaire. Afin de mieux protéger les victimes de la guerre, le CICR coopère avec les États et avec les autres acteurs humanitaires, tant au sein du Mouvement de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge que hors du Mouvement.

Dans les contextes dans lesquels il opère, le CICR contribue à faire connaître le droit international humanitaire à tous les publics: gouvernements, forces armées, forces de sécurité et de police, universités, enfants eux-mêmes et leurs communautés. Dans le cadre de la formation des forces armées au droit international humanitaire, le CICR souligne les obligations relatives à la protection et au bien-être des enfants.

Le CICR se doit d'agir avec impartialité en faveur de toutes les victimes de conflits armés et de troubles intérieurs, en fonction de leurs besoins. Les enfants, y compris les enfants soldats, font l'objet d'une attention particulière.

Le CICR vise à prévenir le recrutement d'enfants dans les forces ou les groupes armés. Dans leur travail quotidien les délégués du CICR veillent à ce que les membres des familles ne soient pas séparés par les combats. Les délégués s'efforcent d'assurer la protection des enfants séparés de leurs parents ou des personnes qui s'occupent d'eux en procédant à leur identification et en les confiant à la garde temporaire d'un adulte ou d'une institution qui les prend en charge. Ils recherchent les proches des enfants et, lorsque cela s'avère possible, rétablissent le contact entre eux jusqu'à ce qu'ils puissent être à nouveau réunis. Afin de retrouver les familles dispersées par les différents conflits, le CICR s'appuie sur 80 délégations et missions ainsi que sur un réseau unique au monde de Sociétés nationales de Croix-Rouge et Croissant-Rouge. Depuis janvier 2003 par exemple, le CICR a réuni plus de 730 enfants avec leurs familles en République Démocratique du Congo(1).

Du fait de leur participation aux hostilités, chaque année des milliers d'enfants sont privés de liberté et il faut prendre des mesures spécifiques pour les protéger. Les délégués du CICR s'efforcent notamment d'obtenir des autorités détentrices que les mineurs soient logés séparément des détenus adultes; qu'ils bénéficient d'une alimentation adéquate, de soins médicaux, d'éducation; que les mineurs aient des contacts directs, réguliers et fréquents avec leurs familles.

Nous le savons tous, les enfants qui vivent dans des conditions sociales précaires (violence, extrême pauvreté, absence de structures de soutien), sont plus susceptibles d'être recrutés comme soldats. L'enrôlement dans les forces ou les groupes armés peut être perçu comme un moyen de s'assurer une sorte de protection et de statut social, voire de survie. Mais la réalité est souvent encore plus tragique. Le recrutement forcé des enfants dans les forces ou les groupes armés est devenu un moyen de terroriser la population civile et d'exercer des pressions sur elle.

Dans le sauve-qui peut d'un conflit, des enfants se retrouvent livrés à eux-mêmes en pleine zone de combats. Sans aucune certitude quant à leur avenir et au destin de leurs proches, ils courent le risque d'être recrutés comme soldats, par la force ou volontairement.

Filles et garçons, sont exploités, humiliés, maltraités. Équipés d'armes meurtrières, abreuvés d'alcool et drogués, forcés à la dépendance vis-à-vis du groupe qui les a recrutés, incapables de trouver une issue ou trop effrayés pour fuir, ces enfants se transforment en un danger à la fois pour eux-mêmes et pour les autres. Ils tuent et se font tuer. En fin de compte, les enfants soldats subissent un profond traumatisme, qui perdure longtemps après la fin des hostilités.

Au lendemain d'une guerre, la démobilisation et la réintégration des enfants soldats sont des conditions essentielles à la reconstruction des sociétés disloquées par la violence. Les accords de paix doivent réserver une place particulière aux besoins des enfants. Il est essentiel de prévoir en leur faveur des mesures tant sociales que psychologiques et médicales.

La question de la démobilisation, de la réhabilitation et de la réinsertion sociale des enfants soldats est l'une des graves préoccupations du Mouvement international de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge. Le CICR collabore avec la Fédération internationale des Sociétés de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge, avec les Sociétés Nationales de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge et avec d'autres organisations humanitaires, à l'élaboration de mesures de réintégration concrètes, spécialement adaptées aux conditions locales.

La Croix-Rouge de Sierra Leone notamment, avec le soutien de différentes composantes du Mouvement, dont le CICR, mène un programme de réhabilitation d'enfants, destiné à faciliter leur réintégration sociale et à sensibiliser leur communauté. Le projet vise, entre autres, les ex-enfants soldats qui ne bénéficient pas des programmes officiels de démobilisation – réhabilitation. Beaucoup sont des filles. En effet, les jeunes filles sont parfois confrontées au rejet de leur communauté d'origine. Elles portent les blessures physiques et psychologiques causées par la guerre, elles ont peut-être été utilisées comme esclaves sexuelles, violées ou rendue enceintes et sont en outre stigmatisées par leur entourage.

Protéger les enfants victimes de la guerre est, avant tout, une obligation de droit international qui incombe à tous les États. La protection spéciale due aux enfants en temps de conflit armé est inscrite dans plus de quarante articles des Conventions de Genève de 1949 et des Protocoles Additionnels. D'autres obligations dans ce sens découlent d'instruments juridiques tels que la Convention relative aux droits de l'enfant, son Protocole facultatif concernant l'implication d'enfants dans les conflits armés. On les retrouve dans la Charte africaine des droits et du bien-être de l'enfant et la Convention de 1999 sur les pires formes de travail des enfants et enfin dans le Statut de Rome de la Cour pénale internationale. Il est important que les États adhèrent aux instruments juridiques protégeant les enfants et surtout que ces instruments soient mis en oeuvre et respectés.

Monsieur le Président,

Le Comité international de la Croix-Rouge tient à réitérer ici son engagement à coopérer avec les États et les autres acteurs nationaux et internationaux pour le respect du droit international humanitaire. Les Services consultatifs en droit international humanitaire du CICR sont à la disposition des États pour les assister dans l'élaboration de lois nationales de mise en oeuvre du droit humanitaire, et sont prêts à accorder leur soutien dans la mise en oeuvre de la Convention relative aux droits de l'enfant et de son Protocole facultatif.

Le CICR invite les États à prendre leur responsabilité non seulement dans le respect et la mise en oeuvre du droit, mais également dans le domaine de sa diffusion. Faire connaître le droit qui protège les enfants est un moyen efficace pour contribuer à la prévention de ses violations.

Merci, Monsieur le Président.

(1) Source: CICR News no. 03/118 du 26 septembre 2003, "République Démocratique du Congo: plus de 80 enfants non accompagnés retrouvent leur famille".


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