Navigation sur le lac Kivu : La population de l’île d’Idjwi en insécurité entretenue !
Les informations que nous livrons au grand public aujourd’hui sont non seulement vérifiables mais aussi bien connues des autorités provinciales sans qu’elles n’y apportent la moindre solution. Seulement, nous y revenons pour que l’opinion tant nationale qu’internationale sache que les insulaires d’Idjwi vivent au quotidien de multiples cas d’injustices et de violation des droits de l’homme ; même les plus élémentaires.
1. Le bac Lac Kivu.
Ce bac est le fruit d’un projet aux objectifs sociaux afin de trouver une solution durable et grand problème de désenclavement de la population d’Idjwi qui, déjà à l’époque de la Deuxième République, connaissait des énormes difficultés de navigation entre l’île et les deux grandes villes : Goma et Bukavu. Les bateaux de la Société Nationale de Chemin de Fer Zaïrois (SNCZ) ne desservaient plus l’île comme cela était prévu. Le Bac Lac Kivu qui avait été conçu pour un but social, n’avait pas résisté à la boulimie économique de son gestionnaire, nous citons « L’Office de Route, Direction Régionale du Sud Kivu ».
Déjà, à partir de 1994, ce Bac fut pris en location par différents clients : les français de l’Opération Turquoise, la logistique des Organisations humanitaires entre les villes de Goma et de Bukavu au Zaïre et entre le Zaïre et les villes de Gisenyi, Kibuye et Kamembe au Rwanda.
En 1996, le Bac était devenu l’affaire de l’AFDL.
A partir de 1998, le Bac réquisitionné par le RCD-Goma était pratiquement l’outil à la commande des troupes rwandaises pour le transport des militaires et du matériel de guerre. Alors que de temps en temps et de façon timide, il effectuait quelques navettes à Idjwi, c’est un ministre du transport du RCD, à l’époque, qui aurait mis fin à ce service. Dès lors et malgré l’unification du pays après les accords de Sun City, le Bac est resté un outil commercial de production pour le compte des Chefs de l’Office de Route.
Aujourd’hui, les insulaires d’Idjwi aperçoivent « leur Bac » en plein lac transportant les produits « Bralima » de Bukavu à Goma et cela sans le moindre souci des hommes au pouvoir, des députés et sénateurs au parlement et de surcroît natifs d’Idjwi et moins encore de prétendants et/ou ambitieux prochains candidats gestionnaires politiques aux échéances électorales en cours dans notre pays.
Dans l’entre temps et cela depuis plus de 15 ans, des personnes meurent par noyade, les survivants sont constamment exposés aux multiples dangers dus
- aux types et états d’embarcations en bois de fabrication locale qu’ils empruntent ;
- aux intempéries climatiques ;
- à l’insécurité créée par les militaires rwandais et autres dissidents et déserteurs ainsi que les anciens hommes en armes mal-démobilisés congolais ;
- à l’insécurité et aux tracasseries entretenues par les militaires marins déployés sur et autour de l’île d’Idjwi et autres agents des services tels que l’OFIDA, la DGM, le Service Maritime, la Police Nationale, le Bureau 2, les autres Militaires Ambulants, autres aventuriers de mauvais goût qui s’improvisent avec la complicité des militaires et policiers, etc.
Le détournement des objectifs sociaux pour lesquels le Bac Lac Kivu avait été conçu au profit des objectifs économiques et égoïstes des autorités de l’Office de Route est un plus sur le malheur qui frappe la population d’Idjwi. Tout le monde devrait être interpellé en commençant par les ressortissants d’Idjwi, surtout les rares qui se trouvent à la commande du pays au sein des institutions de la transition.
2. Les militaires marins déployés à Idjwi et autres services de l’Etat.
D’aucuns se rappellent des aventures homicides auxquelles les militaires rwandais s’étaient livrés en mai et juin 2004 à l’Est de la RDC. Cela a fait que le Haut commandement de notre Armée décide du déploiement des hommes en armes au Kivu, spécialement au Sud-Kivu. L’occasion faisant le larron, pour des raisons peut-être au départ pas mal pensées, des politiciens non autrement identifiés auraient demandé à la haute hiérarchie militaire de déployer des militaires marins à Idjwi et autour de cette île pour, selon les demandeurs, sécuriser le lac Kivu, la population insulaire et leurs biens.
Paradoxalement comme cela apparaît, aujourd’hui, la grande insécurité à Idjwi comme sur le lac Kivu est bien entretenue par les mêmes militaires marins en complicité avec les autres services de l’Etat parsemés par-ci par-là. Suite à ce problème de transport, les insulaires d’Idjwi se rabattent aux pirogues motorisées communément appelées Boat, les bateaux ne pouvant pas accoster à leurs postes.
Pour une pirogue qui part de Bugarula, Chef lieu du Territoire d’Idjwi, pour se rendre à Bukavu, les taxes que l’armateur paye ne peuvent que l’asphyxier ainsi que les passagers à bord. Au départ de Bugarula (Idjwi-Nord), l’armateur verse aux militaires marins postés au chef lieu du Territoire 1000 Fc ; pour le visa du manifeste (liste des voyageurs) : 1500 Fc ; pour avoir le permis de navigation : 3000 Fc. Au premier escale au marché de Chikoma, l’armateur verse 2000 Fc aux militaires marins y postés pour avoir leur visa. Il faut y ajouter 1 litre d’essence obligatoirement.
A Kabonde : à ce poste, on trouve une autre position des militaires marins, le service de la DGM, de l’OFIDA. Le montant global à verser à tous ces services est de 5000 Fc. Il faut aussi y ajouter 1litre d’essence aux marins. Au niveau de tous ces escales, il faut aussi compter au moins une dizaine de personnes, essentiellement les concubines des militaires, qui doivent embarquer gratuitement.
A l’arrivée à Bukavu, la DGM exige 500 Fc ; les militaires marins 500 Fc, le service maritime 500 Fc ; les autres militaires 500 Fc ; le Bureau 2 : 500 Fc ou / et 1 litre d’essence ; les frais d’accostage 1400 Fc ; le service de tourisme 1000 Fc.
Au retour, les mêmes montants sont exigés, les mêmes gratuités sont imposées et pour certaines rubriques, les montants sont revus à la hausse. C’est le cas du permis de navigation qui est acheté à 2500 Fc au départ de Bukavu ; le Manifeste est signé moyennant 2000 Fc, le visa de la DGM est vendu à 1500 Fc, le visa des militaires marins est fixé à 1000 Fc.
Le pauvre armateur d’Idjwi qui, tant soit peu, s’investit dans l’allégement des difficultés de transport de ses compatriotes et dans la recherche de son bien être, est sommé de payer pour un aller-retour, une somme équivalente à 75$ US.
3. Quel est le sort des passagers au cours de cette aventure ?
Tout passager au départ d’Idjwi doit se munir de son identité, ce qui est tout à fait normal pour des raisons de sécurité. Mais alors dans un pays comme le nôtre où nous avons connu mille et une sortes de cartes d’identités, les militaires ne manquent pas d’astuces pour nuire. Il suffit qu’il y ait une lettre qui ne soit pas lisible ou que la photo ou la carte elle-même soit quelque peu endommagée pour que son propriétaire soit traité de suspect pas dans le bon sens de sécurité mais seulement pour lui extorquer son argent.
Au départ de Bukavu, chaque passager paye 100 Fc aux militaires ambulants pour chaque colis. A l’arrivée, les militaires marins postés Idjwi exigent à leur tour 100 Fc pour chaque colis qui sort du boat. A défaut de ce montant, le colis est tout simplement confisqué et pour le retirer quelque temps après, l’amende est majorée à l’appréciation du militaire.
Au poste de Kabonde, le Commandant des militaires marins décide de la navigation ou non du boat. S’il tient à rançonner les armateurs, il décide que l’embarcation et toute sa cargaison passe la nuit à ce lieu dans des conditions infrahumaines. Aux armateurs coincés entre les marins et les passagers, le choix.
4. Que faire ?
1°. L’Office de Route doit restituer l’usage du Bac Lac Kivu au service de désenclavement de la population insulaire d’Idjwi. Ce Bac n’a pas été conçu pour de fins commerciales au profit du personnel ou des chefs de cet office. C’est une interpellation, mieux une revendication qui mérite d’être relayée !
2°. Un militaire non rémunéré est plus dangereux qu’un mercenaire. A la longue, il devient agresseur potentiel de ses propres compatriotes. C’est le cas aujourd’hui en RDC. Sans prétendre connaître ce qui se passe sous d’autres cieux, nous constatons que notre pays bat le recors quant au nombre des militaires, et pas les moindres, qui sont au chômage. Et même parmi ceux qui sont en poste, il y en a qui ne reçoivent pas leur solde. Il est tout à fait normal que pour survivre, loin de leurs familles, ils cherchent à se payer sur le dos des pauvres citoyens, la force ou la présence de son fusil ou sa baïonnette ou encore sa cordelette faisant la loi. Le pouvoir en place a trouvé mieux de les remplacer après un temps mais cela ne change rien car c’est juste remplacer Saint Pierre par Saint Paul. Quand ils se relayent, ils se communiquent en même temps les méthodes d’usage pour leur survie. Il faut que le pouvoir en place paye les salaires des militaires en mission. Ceux qui sont à l’Est du pays ne le sont pas moins.
3°. Si le pouvoir en place ne prend pas cette affaire en charge, il aura demandé à la population d’agir à sa place. En attendant, compatissant avec la population d’Idjwi, la Bor dit non à cette façon de nuire ses propres concitoyens.
