Sur fond de la logique des composantes:Des éléments des FARDC s’affrontent les uns contre les autres dans la Plaine de la Ruzizi

Des victimes civiles sont enregistrées

Ce jeudi 03 novembre 2005 aux environs de 16 heures 30 à Katogota, des éléments des FARDC commandés par le Colonel Mosala se sont affrontés à ceux sous les ordres du Major Abdou. Les combats se sont étendus au centre de négoce de Kamanyola et à la localité de Lubarika ce vendredi matin. On compte déjà des victimes parmi la population civile. Dans les seuls quartiers Katimbirwa et Kashenyi, à Kamanyola, le bilan provisoire fait état de 1 homme tué, Mr Masumbe Wemba, et 2 blessés graves, une femme et un enfant de 4 ans. Egalement, plusieurs familles ont fui leurs habitations par peur des affrontements. Les informations en provenance de la Plaine de la Ruzizi, notamment Kamanyola, Lubarika et Katogota, affirment que des armes lourdes et automatiques ont été utilisées par les deux parties. Ce qui fait craindre que le bilan serait encore plus lourd.

Selon la déclaration de l’autorité provinciale du Sud-Kivu faite sur Radio Okapi, antenne nationale, captée ce vendredi 04/11/2005 matin, cette confrontation entre les troupes d’une même armée serait consécutive au refus du Major Abdou et ses hommes de fusionner en une seule brigade avec les troupes dirigées par le Colonel Mosala et se mettre sous les ordres de celui-ci tel que annoncé le 02/09/2005 par le commandement de la 10ème région militaire.

L’opinion se souviendra que le retour clandestin au Congo en septembre 2005 de plusieurs hommes armés ayant combattu aux côtés du Colonel Jules Mutebutsi et du Général Laurent Nkunda lors de leur dissidence en mai et juin 2004 aurait agrandi encore le fossé entre les deux groupes. Dans ce sens que le passage des infiltrés a eu lieu à des endroits laissés par les ex-Maï Maï à leurs remplaçants de l’ex-Armée Nationale Congolaise (ANC), ancienne branche armée du RCD Goma en application de la mesure de repositionnement des troupes décidée par la hiérarchie militaire provinciale à la même date du 02 septembre.

Certaines sources disent qu’au moment où le Colonel Mosala et la 10ème région accusent Abdou de non respect des ordres donnés, celui-ci rétorque à son tour qu’il ne souhaite pas œuvrer sous le commandement direct d’un chef de brigade qui faciliterait l’invasion du territoire par des insurgés dont seuls lui et ses hommes auraient arrêté la progression vers Uvira au niveau de Kamanyola en juin 2004

Ces affrontements qui ont commencé depuis hier jeudi vers 16 heures 30 à Katogota pour s’étendre par la suite aux périphéries de Kamanyola, Luvungi et Lubarika sont aujourd’hui source d’une forte inquiétude dans la population civile. Jusqu’à 10 heures de ce vendredi, à partir de la route principale à Kamanyola, Katogota et Luvungi, des crépitements d’armes lourdes et d’armes automatiques étaient perceptibles vers Kagaragara et Lubarika. Les populations prises d’effroi sont pourtant interdites de traverser la frontière pour s’abriter, soit au Burundi soit au Rwanda.

Plusieurs habitants de ces localités se questionnent sur la visée réelle de ceux qui se battent. Ils révèlent que ces affrontements surviennent après que des éléments des FARDC commandés par le Colonel Mosala ont, dans l’avant-midi, tué Madame Roda Kishondo âgée d’environ 60 ans et blessé 3 autres personnes à Katogota. Ces victimes sont des martyres de la protestation des paysans contre l’expropriation sans indemnisation de leurs champs, environ 700 hectares disent certaines sources, octroyés à une femme d’affaires.

Des sources basées dans ce rayon soutiennent que, effrayés par ces deux événements malheureux quasi-simultanés et se rappelant du massacre commis en mai 2000 dans ce village par le RCD alors en rébellion, les populations ont déserté Katogota, y abandonnant ainsi le corps inerte de cette dame abattue par balle par les militaires congolais. Elles se sont déplacées vers Kamanyola et Luvungi.

Il est déplorable qu’à ce moment où la Transition tend vers la fin de sa période de prorogation, l’armée n’est toujours pas réunifiée comme prévu dans l’Accord Global et Inclusif. C’est plutôt un mépris et une suspicion qui continuent à sévir entre des troupes ex-belligérantes composant ladite armée. Comment cette armée pourra-t-elle prétendre rassurer les populations pendant qu’en son sein des groupuscules se battent encore les uns contre les autres ?

Nombreux sont les observateurs qui pensent que si l’objectif de cette offensive est réellement de contraindre Abdou et ses hommes à adhérer au brassage, cette bonne initiative ne serait donc qu’à ses débuts car, soutiennent-ils, des chefs militaires caciques ne s’inscrivant toujours pas dans la logique de la réunification de l’armée sont légion, notamment au Sud et au Nord-Kivu.

L’association Héritiers de la Justice reste préoccupée par cette situation qui jette en errance des milliers de gens dont des femmes et des enfants en cette saison de pluies. Elle rappelle au gouvernement de Transition que l’article 53 de la Constitution actuelle stipule que « tous les Congolais ont droit à la paix et la sécurité ».

Aussi, Héritiers de la Justice demande-t-elle à la hiérarchie militaire de s’investir dans le malentendu qui règne au sein de différentes unités des FARDC en cette période où l’on redoute d’un moment à l’autre l’éclosion d’une nouvelle guerre en RDC à partir de l’Est. Tout en exigeant aux deux parties d’épargner les vies et les biens civils, elle demande au Commandant de la 10ème dont elle salue la prompte descente sur les lieux, de mettre fin à cette offensive qui ne fait que verser encore davantage du sang innocent des Congolais et augmenter les souffrances des habitants meurtris par plusieurs années de guerres inutiles.

A suivre…

Fait à Bukavu, le 04 novembre 2005


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