INSECURITE A BUKAVU: ENCORE DES MORTS
Mardi 24 avril 2007, les habitants du quartier Muhungu et environs n’ont pas dormi.
Déjà vers 20h30 des coups de feu ont été entendus dans ce quartier, à une heure d’intense circulation dans ce milieu avoisinant le marché de Nyawera où des tractations d’affaires se font jusqu’au-delà de 22 heures.
Trop tôt donc pour les bandits armés de faire irruption dans le quartier, de cambrioler une résidence et de tirer d’abord en l’air pour s’enfuir.
Dans leur fuite, ils vont obliger une sentinelle qui garde des véhicules dans le quartier de leur servir de guide jusqu’à la première sortie où, ayant retrouvé le chemin vers le camp Saio, ils vont loger une balle dans la tête du pauvre gardien, monsieur MUBALAMA.
La police qui vient toujours en retard est tout de même descendue sur les lieux.
Des jeunes qui suivaient un match à la télé ont été pris entre les feux. Pendant que deux d’entre eux étaient couchés par terre pour se mettre hors de portée des balles, les policiers auraient vu l’un d’eux bouger et auraient tiré sur lui, d’après le témoignage d’un habitant. C’est ainsi qu’a été abattu l’étudiant ABEDI Muhamed de G1 Anglais à l’ISP/Bukavu, âgé de 21 ans qui portait une chemise blanche.
Une autre victime de cet échange de tirs c’est monsieur Gabriel, enseignant de Géographie à l’Institut Fazili qui gît entre la vie et la mort à l’hôpital.
Pourquoi l’insécurité persiste ? Et Pourquoi chaque fois c’est le quartier Muhungu ?
La population de Bukavu dénonce l’impunité. C’est vrai qu’il y a eu des procès publics où des membres de bandes armées ont été condamnés à des peines capitales dont l’exécution n’a jamais eu lieu.
Les analystes avertis lisent une certaine complicité entre les agents de l’ordre et les bandes armées.
Enfin, la proximité du quartier Muhungu avec le camp militaire Saio ainsi que l’itinéraire habituel des bandits lorsqu’ils sont traqués laisse croire qu’il y a un lien entre ce camp et la situation d’insécurité dans le quartier Muhungu.
La journée de ce mercredi 25 avril a été des plus perturbées à Bukavu, spécifiquement dans les quartiers Essence, Muhungu et Nyawera où les officines, magasins et marchés ont ouvert difficilement.
Le matin, les jeunes du quartier Muhungu, les étudiants de l’ISP, les « Maybobo » (enfants de la rue) et les « demob » (démobilisés) étaient dans la rue pour protester, avant de prendre le chemin du cimetière de la Ruzizi qui traverse la ville.
Ils ont érigés des barricades, chassés les enfants dans les écoles et rançonnés les paisibles passants.
La police débordée, s’en est prise à tout le monde et les camionnettes bleues ramassaient tout celui qui traînait dans la rue pendant la débandade.
Un jeune homme a été tabassé à Nyawera parce qu’il n’arrivait pas à trouver une place dans un petit salon de coiffure envahi par la foule. Après un check rapide, il a été trouvé inoffensif et relâché mais son téléphone est parti. Nous avons enregistré beaucoup de plaintes de gens qui ont été dépouillé de leurs téléphones par nos policiers.
Les autorités de la province ont du pain sur la planche. « Trop c’est trop, nous ont dit les jeunes à l’EDAP, nous avons envie de vivre… Nos autorités ne doivent pas se tromper de priorités, imposer des casques aux motards… et ne rien faire lorsqu’on nous tue… »
Ils espèrent que leurs cris soient entendus au plus haut niveau car les manifestants scandaient : « votez Bemba… votez Azarias ». Une population pacifique, qui n’aspire qu’au bonheur, quel que soit celui qui le lui assurera. Devront-il attendre 5 ans ou auront-ils quelques signes d’espoir de la part de nos dirigeants ? Qui vivra verra.
Humanité Solidaire, 25 avril 2007

