LES AGENDAS ECONOMIQUES PRINCIPALE CAUSE DELA GUERRE A L`EST DE LA RDCONGO
Qu’est-ce qui explique le regain des tensions dans l’Est de la République démocratique du Congo ? Une fois encore, c’est l’ONG britannique Global Witness qui dévoile les enjeux cachés d’une guerre dont on a désormais du mal à comprendre les méandres. La bataille de l’Est change de dimension au fil des mois, devenant un terrain où certaines puissances sous-régionales cherchent à s’affirmer.
A Kinshasa comme en dehors de la République démocratique du Congo, les rendez-vous se multiplient pour une sortie en douceur de la guerre dans laquelle est plongée la partie Est de la RDC.
Outre les Nations Unies, l’Union européenne veut aider la RDC à sortir de cette crise en tentant de rapprocher les protagonistes à travers des négociations directes. Mais, à Kinshasa, le ton est au durcissement, le gouvernement refusant d’engager des négociations directes avec le CNDP de Laurent Nkunda qui, de son côté, menace d’en découdre avec le régime de Kinshasa si celui-ci s’entêtait à rejeter tout dialogue direct.
A quoi donc tient la position de Kinshasa ? Que cache l’entêtement de Nkunda ? Là réside l’énigme de l’épilogue de « Goma ».
L’ENIGME
L’ONG britannique Global Witness donne quelques indications pertinentes sur « la guerre de l’Est », en réponse à des questions précises. Qu’en est-il au juste ? Pourquoi tarde-t-on, après tant d’années de conflits armés, à neutraliser tous les mouvements rebelles qui opèrent allègrement dans l’Est de la RDC ? Qui entretient tous ces groupes armés ? Y a-t-il un bras séculier ?
« Le pillage des ressources reste le moteur du conflit dans l’Est de la RDC », affirme sans détours Patrick Alley, directeur de Global Witness. « L’attention internationale de haut niveau que recueillent les événements récents est bienvenue. Mais, les initiatives diplomatiques à courte échéance n’engendreront une paix durable que si l’on s’emploie à résoudre les causes sous-jacentes du conflit. Les avantages économiques associés à la guerre dans cette région restent l’un des motifs clés des parties belligérantes », soutient-il.
Le Nord et le Sud-Kivu, sont des provinces riches en minerais, notamment en cassitérite (minerai d’étain), en or et en coltan. Selon l’Ong britannique, le commerce des minerais sous-tend la guerre depuis 1998. La quasi-totalité de principaux groupes armés impliqués dans le conflit, ainsi que des soldats de l’armée congolaise nationale, font le commerce de ces minerais de manière illégale depuis des années, dans la plus totale impunité. Nombre d’entre eux imposent des taxes à la population civile et extorquent des minerais ou de l’argent le long des routes ou aux postes frontaliers.
En juillet-août 2008, Global Witness a rendu compte de l’implication importante de groupes armés et d’unités militaires congolaises dans le commerce de la cassitérite et de l’or au Nord et au Sud-Kivu. Dans son communiqué de presse du 10 septembre 2008, elle a signalé que « le contrôle des mines, exercé par les parties belligérantes, menace les efforts de paix dans l’Est du Congo ».
« Tant qu’il y aura des acheteurs prêts à participer à ce commerce, directement ou indirectement, avec des groupes responsables de graves atteintes aux droits de l’homme, ces groupes n’auront aucune raison de déposer leurs armes », commente Patrick Alley.
LA GRANDE FARCE
L’ONG britannique condamne la naïveté de la communauté internationale dans le déploiement de toutes ses initiatives – infructueuses, d’ailleurs – pour le retour de la paix dans la partie Est de la RDC. « La situation actuelle dans l’Est de la RDC illustre le fait que l’on ne s’attaque pas, à l’échelle internationale, aux liens entre le conflit armé et le commerce mondial des ressources naturelles », s’étonne Global Witness. A ce propos, elle rappelle le rôle des matières premières (diamants, bois, cacao) dans la poursuite des conflits en Afrique et en Asie du Sud-Est. « Mais, la communauté internationale ne parvient toujours pas à s’accorder sur ce qui constitue une ressource du conflit. Des organisations telles que les Nations Unies ne disposent ni des moyens adéquats, ni d’une détermination suffisante pour pouvoir mettre un terme au lien entre les ressources et les conflits. Global Witness préconise l’élaboration par le Secrétaire général des Nations unies d’un rapport sur les ressources naturelles et les conflits, démarche qui constituerait une première étape vers l’instauration d’une stratégie internationale plus énergique », s’indigne-t-elle.
Confortant son analyse, Global Witness relève que « les agendas économiques sont à la base des guerres depuis la nuit des temps ». Selon Patrick Alley, « la nouveauté réside dans la façon dont des groupes armés parviennent à s’immiscer dans un marché mondialisé des ressources ‘pillables’ encouragé à la fois par le monde occidental et oriental. La situation en RDC est un avertissement pour les décideurs internationaux qui éludent cette question ou la traitent avec maladresse depuis une décennie : agissez maintenant pour que le conflit armé ne profite plus à personne ».
Après l’implication avérée des puissances occidentales dans ce conflit, la « guerre de l’Est » commence à révéler la volonté de la communauté internationale de faire participer des puissances sous-régionales à la résolution des conflits armés en RDC. C’est le cas de l’Angola, poussé par la France à s’y impliquer.
Même si l’Union africaine pense encore jouer un « rôle central dans cette affaire parce que la crise congolaise n’est qu’un aspect d’une crise lancinante », la guerre de l’Est est une belle brèche pour des pays, comme l’Angola, qui s’efforcent d’imposer leur hégémonie en Afrique centrale, de s’affirmer comme tel.
